vendredi 7 décembre 2012

ÉLOGE DU PRÉSENT.


 Au Lac des Roches (au nord de la Ville de Québec), le 24 novembre 2012.



Mes vacances approchent: je prends l'avion le mercredi 12 décembre. Je serai au magasin d'ici là, mais de manière un peu imprévisible, en priorisant les préparatifs de départ. Je serai absent jusqu'à la mi-janvier, partagé entre les affaires et le plaisir. J'espère pouvoir alimenter ce blogue occasionnellement pendant mon voyage.

*

Cette semaine, au magasin, cette conversation m'a laissé perplexe:

'' Le vendeur m'a dit que la selle ne s'ajustait pas, qu'elle était fixe.

-Vous voulez dire que le vélo hybride était neuf, et que la selle ne pouvait pas s'ajuster en hauteur?

-Oui, c'est ce que le vendeur m'a dit, et moi j'aimais ce vélo et je suis partie avec tel quel.''

Je n'en croyais pas mes oreilles. J'ai pris l'outil approprié et j'ai facilement desserré la vis pertinente. La tige de selle coulissait aisément et j'ai pu ajuster la hauteur sans difficulté... Je tairai le nom du magasin en question.

*

J'écoute beaucoup de musique en ce moment, dans le but de préparer les émissions de radio que je produis à chaque vendredi midi (midi-jazz, ckrlmf.qc.ca). Ça provoque chez moi une réflexion sur les choix que je fais. D'autant plus que nous sommes cinq à alterner à chaque midi de la semaine, et je vois ce que chacun choisit. Notez que je viens tout juste de faire ma dernière émission avant Noël en ce vendredi 7 décembre.

Le jazz n'est pas une musique nouvelle, elle existe depuis à peu près cent ans. Et j'en écoute depuis trente-cinq ans. Je l'ai donc vu évoluer, d'autant plus que j'ai travaillé comme disquaire dans les années '80, en plus d'aller à New-York régulièrement durant ces années-là, ce qui m'a amené à voir beaucoup de spectacles de jazz du plus haut niveau.

Durant les années '90, j'ai perdu contact avec l'actualité du jazz, sans arrêter d'en écouter. Je l'ai repris il y a à peu près quatre grâce à l'émission Midi-jazz, à laquelle on m'a récemment invité à participer en tant que responsable du vendredi.

Je pourrais faire jouer beaucoup de musique des années '70 et '80. Je la connais, et il me reste encore un bon nombre de vinyles en excellent état. Je le fais peu, même si j'en écoute encore. J'ai la passion du présent.

Le présent dépend du passé, et c'est pourquoi je suis très heureux de connaître celui-ci. Mais la musique d'aujourd'hui a un atout sur celle d'hier: elle la connaît et peut bâtir sur les bases jetées par Ellington, Parker, Coltrane et Miles. Et les collaborateurs de Manfred Eicher.

Le jazz a l'avantage d'être extrêmement perméable. Les influences viennent de toutes les époques, ou presque, et de tous les continents (sauf les deux pôles...). Aucune musique, à ma connaissance, ne s'est autant métissée. Celui qui dit ne pas aimer le jazz ne le connait pas. Il y a toujours un jazz, quelque part, que quelqu'un peut aimer. Je n'aime pas tous les jazz, mais j'apprécie sa diversité et son ouverture. Jazz s'écrit avec deux z, c'est encore mieux qu'avec un s.

Le jazz est plus intéressant que jamais. Plus qu'avant, et il l'était déjà. Pourquoi? Parce que les couches se superposent, les décennies se suivent et ne font qu'ajouter à un énorme corpus de musiques de styles et d'humeurs très variées. Et quand je dis très variées, je veux dire vraiment, très variées.

Les jeunes musiciens ont écouté ceux qui les ont précédés. On reconnaît dans leurs oeuvres les couleurs du passé, et c'est très bien ainsi. Ils nous redonnent une musique qui est la synthèse de tout ce qui est venu avant, avec une belle maîtrise de leurs instruments respectifs, tout en amenant avec eux une perspective d'aujourd'hui. Les musiques sont comme les vélos, la qualité n'a pas d'époque.



La Côte Gilmour?!?!

De la même façon, j'ai la passion du vélo présent. Le vélo du passé m'intéresse, et je le connais bien. Je l'ai utilisé, réparé, tutoyé, vendu, acheté, modifié, amélioré. Et je le trouve parfait pour tous ceux qui roulent à petit budget, s'il est bien choisi et bien entretenu. Mais regardez avec quoi je roule: c'est un vélo inimaginable il y a quinze ou vingt ans. Mon Alu9 est léger et polyvalent, et coûte moins de mille dollars. Mon carbone monocoque pèse moins que mon Bititane italien des années '90, et vaut presque trois fois moins. Vous avez entendu dire que les cadres en aluminium ne sont pas durables? Mon Falardeau Alu8 (et non pas Alu9, c'est la génération qui a précédé) est sur la route depuis dix ans, il roule maintenant l'hiver, tâche ingrate s'il en est, et il va très bien, merci. Comme tous les autres Alu8: aucun client ne m'en a rapporté un dont le cadre était devenu inutilisable pour quelque raison que ce soit.




Alors si vous vous intéressez aux vélos du passé, il me fera plaisir de vous aider si je le peux, mais le vélo d'aujourd'hui est celui que je préfère car à son meilleur, il contient les bons éléments du passé, tout en y ajoutant le génie des meilleures améliorations qui nous ont été offertes depuis. Un peu comme le jazz, non? Le bon vélo d'aujourd'hui est plus léger, mais aussi plus maniable, plus ergonomique, transmission plus agréable, freins plus efficaces, plus grand choix de pneus, etc.

Là où je décroche, c'est quand le marketing prend les décisions sans se soucier des besoins des gens. En leur agitant une carotte sans leur parler des désavantages, en insistant sur les apparences quand les lacunes techniques sont flagrantes, roues lourdes, freins lourds, sur des cadres qui finalement ne sont pas toujours aussi légers qu'on pourrait le croire.

Ibrahim Maalouf: ''Beirout''

3 commentaires:

  1. Excellent article.

    J'aime beaucoup le passage qui critique tout le «marketing» qui exagère un peu les avantages des cadres en carbone (sans en mentionner les inconvénients).

    Ceci dit, bonnes vacances et n'oubliez pas de nous envoyer une carte postale ! :-D

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  3. Très bon article mon cher Paul. Je suis content de prendre le temps de te lire enfin.Le jazz avec 2 "z" au lieux d'un "s" c'est très bon! Merci et à bientôt. Bonne réflexion sur les vélos et le jazz.

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