vendredi 31 août 2012

L'ULTIME.


Un Falardeau carbone monocoque. D'occasion, il est disponible pour un montant de 1800$cad + taxes.
Fiche technique:
-Tout Dura Ace 10 vitesses, sauf le pédalier et le dérailleur avant qui sont de série FSA compact.
-Fourche carbone à pivot carbone. Guidon ''wing'', potence Look et tige de selle tous en fibre de carbone.
-Roues 100% neuves Fulcrum Racing 7 (négociables).
-Porte-bouteilles fibre de carbone inclus, pédales non-incluses.
-Vérification générale incluse.
Voir photos plus bas sur ce même message.

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L'automne approche et certains d'entre vous commencent à penser au vélo qu'ils utiliseront lorsque le froid reviendra. L'hiver québecois a ses exigences...

Voici un échange de courriels que j'ai eu cette semaine. Un cycliste m'écrit:


J'aime bien le vélo qui apparait dans votre blog il y a deux semaines, "Un Falardeau Alu9 chaussé 700 x 32mm"

Moi, je me cherche un vélo d'hiver.  Mon trajet vélo-boulot est de 16km x2.  Je roule en toutes conditions, neige glace froid...

Alfine 11 vitesses et manettes rapid fire
ratio 39x20  équivalent, ou plus lent
freins Shimano M505 (à disque, hydrauliques)
tige de selle carbone
fourche carbone
porte bagage arrière
ailes et garde-boue

Pour en faire mon vélo d'hiver ultime...


Ma réponse:


Il n'y a pas d'empêchement technique  pour la réalisation d'un tel vélo. J'ai les relations commerciales qui permettent de se procurer ces pièces. Ceci dit...

Je n'ai pas fait le calcul exact du coût de production d'un tel vélo, mais c'est certain que le prix de détail dépassera les 1000$. Or, je suis personnellement d'avis qu'un vélo d'hiver québecois ne devrait pas être aussi onéreux, étant donné le vieillissement accéléré qu'un vélo peut subir dans de telles conditions. Parce qu'on ne parle pas de simplement rouler sur une belle neige blanche et propre...

Non seulement je préfère un vélo plus abordable, mais aussi plus simple. Il faut pouvoir entrer dans n'importe quel magasin de vélo et se procurer facilement des pièces de remplacement, car le besoin de telles pièces est inévitable, dès la fin du premier hiver. Parfois même avant. Car à 150 kms/semaine, pas de doute, il y aura du travail à faire.

Ce ne sont pas tous les mécaniciens qui sont familiers avec ces freins et surtout, ces moyeux. Et méfie-toi de ceux qui disent que ces moyeux arrière sont sans entretien. La question n'est pas de savoir si ils requièrent de l'entretien, mais bien plutôt quand ils en auront besoin. 

Le besoin d'étanchéité du moyeu arrière est plus grand dans les villes québecoises que dans bien des conditions hivernales que l'on retrouve ailleurs dans le monde. Je n'ai personnellement pas utilisé un tel moyeu en hiver (ou même en été), mais mon expérience avec un autre marque/modèle était que l'étanchéité était insuffisante à long terme et que oui, il faudra l'ouvrir, ce n'est qu'une question de temps. 

J'ai donc une préférence marquée pour un cadre léger (Falardeau Alu9) habillé avec des pièces abordables (niveau Altus/Alivio) qui me donnent un vélo facile d'entretien et dont le coût d'utillisation reste raisonnable. D'ailleurs, avec un tel vélo, plusieurs de mes clients peuvent faire une bonne partie de l'entretien eux-mêmes. Ce que j'ai personnellement toujours encouragé, particulièrement chez les cyclistes d'hiver. Les pièces Shimano de milieu de gamme ont une tradition de bon fonctionnement typique de la production industrielle japonaise en général. Et non, un dérailleur arrière en hiver n'est pas une aberration peu fiable. Nous faisons de longues sorties assidues avec les nôtres, en janvier, février, etc., et il n'y a pas d'irritant important.

Il y a un détail qui n'en est pas un: la tension de la chaîne. Sur un vélo mono-vitesse, la tension est obtenue en reculant la roue dans des pattes de fourche arrière qui doit être horizontales, contrairement aux pattes de fourche verticales qui équipent la plupart des cadres modernes (incluant celles des Falardeau Alu9). J'ai pris des renseignements de l'importateur Shimano et voici une partie de la réponse:


Pour la tension, la roue doit être installée à la main et il ne faut pas mettre autant de tension que dans un mono-vitesse.
Le client peut trouver toutes les informations sur le site de Shimano
La tension recommandée est indiquée à cet endroit.


On m'a certifié que les moyeux Alfine sont prévus pour être installés sur tous les cadres, peu importe les pattes de fourche.

Et pour ce qui est des talons qui accrochent sur les bases, je suis un peu perplexe: étaient-elles si évasées? En tout cas, je n'ai jamais vu un client se plaindre de son Falardeau en me disant que ses talons accrochaient!     Tu peux en essayer un si tu veux...



Et dans un courriel subséquent, le cycliste me dit (en italique, mes commentaires auxquels il répond):


-Les lubrifiants conçus pour l'été ne sont pas appropriés au froid: ils s'épaississent et peuvent nuire au bon fonctionnement. Alfine et les freins hydrauliques ne sont pas dans leur zone de confort en hiver québecois. Je ne les ai pas utilisés personnellement et je ne peux mesurer l'inconvénient que ça représente.
- mes vélos dorment au frais dans le garage (10C), lorsque je sort, après quelques minutes, je crois pouvoir sentir l'effort plus grand requis par l'huile/la graisse qui fige. Le moyeu Alfine (11 vitesses) fonctionnait bien, quoique un peu lourd, ça se sent à l'arrière. J'ai eu plus de problèmes avec les freins hydraulique de mon MTB (Rocky Mountain Vertex 30 et freins shimano Deore ) qu'avec le vélo de MEC (Shimano M505).

-Les cadres acier gagnent beaucoup à subir quelques couches de peinture antirouille avant l'hiver.

Mon fixe n'a aucune trace de rouille à l'extérieur mais la couche de peinture semble épaisse et j'ai vu de l'eau rouillée sortir par les trous de drainage du cadre en le lavant. Probablement de la rouille due à la condensation.

Le cadre est un Paké: http://www.pakebikes.com/product/C69BA7/Rum+Runner+Steel+Track+Frame

si tu ne t'accroches pas dans les talons dans d'autres marques/modèles classiques, tu ne t'accrocheras pas dans un Alu9.

- en effet je n'ai jamais eu ce problème avec mes autres vélos. Avec le MEC, il faut vraiment pédaler les pieds parallèles au cadre et en hiver avec des bottes, il faut pédaler avec un léger "Toe-in".


Le problème du cadre, c'est de vouloir employer des freins à disques avec le moyeu interne et une chaine sans tendeur. Il faut que la machoire puisse bouger pour s'ajuster à la position de la roue !

-Pour régler le problème du positionnement de la machoire de frein à disque arrière (à cause de la tension de chaîne), on peut mettre un frein à tirage linéaire (''v-brake'') seulement sur la roue arrière. Quitte à utiliser le frein à disque avant de manière prioritaire chaque fois que ce n'est pas contre-indiqué.


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Suite au message du 25 août dernier, concernant le cas Armstrong, lemonde.fr publie un interview de Christophe Bassons où il est question entre autres  de Richard Virenque: http://www.lemonde.fr/sport/article/2012/08/27/christophe-bassons-en-hiver-je-distancais-richard-virenque-dans-les-cotes_1751911_3242.html .
Ceux qui ne connaissent pas Bassons gagneront à lire l'introduction de l'article. Il s'agit d'un ex-coureur professionel au discours atypique.



Et on trouve à la fin de l'article le commentaire suivant de la part de M. Uztarroz:


ricardo uztarroz, ex-petit cycliste amateur 27/08/2012 - 17h49
Mon cher Christophe, je mets pas en doute ta sincérité mais je dû mal à croire que, depuis tes débuts dans le vélo, tu ignorais ce que voulait dire allumer la chaudière, billes de quatre, boulons de 18, la petite lili, tonton, riri, tintin (les amphètes), que tu ne savais qui était le docteur Mabuse grand distributeur de pot belge, les cornues pédalantes, saler la soupe, allumer les phares, et j'en passe des meilleures. J'ai fait du vélo il y a plus de 50 ans. On embarquait la topette déjà.


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J'aime bien ces vieux instruments usés, comme cette basse électrique, qui ont du vécu... et du métier.





samedi 25 août 2012

TOUT EN NIANT.

Falardeau Alu9
Un tout-Alivio d'une valeur de 765$ + taxes.


La nouvelle est tombée vendredi le 24 août 2012: au grand dam des avocats concernés, Lance Armstrong, septuple champion du Tour de France (1999-2005), donne sa démission. Poursuivi par la United States Anti-Doping Agency, il aurait pu se battre pour défendre son innocence mais il a décidé le contraire. Tout en niant s'être dopé. 

De cette façon, il évite un étalage scandaleux de témoignages peu élogieux sur des comportements qu'il a toujours refusé d'admettre. Même s'il avait gagné ce procès, son image en serait sortie ternie à tout jamais.  Encore plus qu'elle ne l'est déjà.

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Et tout de suite, la USADA lui retire ses sept  titres tant convoités. Seulement je me pose une petite question: comment peuvent-ils lui enlever ces titres, puisque cette agence américaine ne les lui a jamais donné, ni quelqu'autre instance américaine. Ce ne sont pas des Américains qui organisent le Tour de France que je sache, c'est Amaury Sport Organisation, chapeautée par l'Union Cycliste Internationale. 

Et en ce beau vendredi, l'UCI s'est contentée d'émettre un laconique communiqué, remettant à plus tard toute décision concernant le cas Armstrong. Pas surprenant: c'est d'un tremblement de terre qu'il s'agit sur la planète Cyclisme. Bien sûr, ceux qui suivent l'actualité de cette planète savaient que Lance était dans l'eau chaude, mais la tournure des évènements est quand même lourde de conséquences. Et surtout, elle est contraire à l'habitude d'Armstrong de toujours nier s'être dopé.

Il faut comprendre ici que l'argumentation de l'USADA n'était pas basée sur un ou deux tests de dépistage positifs, comme c'est souvent le cas, mais plutôt en bonne partie sur une série de témoignages défavorables au champion. D'où le délai entre les accusations et les exploits en cause.

Que va faire l'UCI? Faire du troisième un deuxième, et du deuxième un champion? Voyons voir.

En 2005, par exemple, le deuxième était Ivan Basso. Plus tard impliqué dans l'affaire Puerto, il a été suspendu pendant deux ans des compétitions cyclistes. Le troisième: Jan Ulrich, lui aussi impliqué dans la même affaire, il a plus tard avoué l'inavouable. Devra-t-on prendre les numéros 4, 5 et 6 pour en faire les numéros 1, 2 et 3? Quel podium! Et même si on le faisait, on se heurterait à d'autres exemples connus des coureurs sanctionnés. Voyez vous-mêmes:

http://www.nytimes.com/interactive/2012/08/24/sports/top-finishers-of-the-tour-de-france-tainted-by-doping.html?ref=global-home

Les sages de l'UCI ont de quoi méditer avant d'émettre un communiqué sans temporiser. Une décision qui changera tous les palmarès des Tours de France concernés. Ils avaient beau être prévenus, ça ne s'improvise pas.

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Le dopage n'est pas un phénomène récent, au contraire. Pas plus qu'il n'est limité au cyclisme, pas du tout. Ce qui est nouveau, c'est le degré d'implication de certains médecins qui supervisent la prise de médicaments qui souvent n'existaient pas à l'époque de Merckx ou Louison Bobet. On ne parle plus d'amphétamines.

En fait, le printemps 1994 a peut-être marqué un point tournant dans l'escalade de l'armement. Plusieurs coureurs étaient perplexes en voyant les coureurs de la Gewiss-Ballan s'imposer outrageusement dans les classiques du printemps. Ces performances ont été par la suite associées à l'apparition de l'EPO dans le peloton. Plusieurs autres coureurs ont depuis été trouvés coupables d'avoir tutoyé le produit depuis, incluant la Québecoise Geneviève Jeanson. 

Extrait de la page Wikipedia de la Gewiss:

''En 1994, le sponsor change, et l'équipe devient Gewiss-Ballan, retrouvant un maillot identique à celui de 1989. Cette même année, l'équipe embauche Bjarne Riis, Giorgio Furlan et Guido Bontempi, ainsi qu'un médecin dont la réputation deviendra rapidement sulfureuse : Michele Ferrari1.
L'équipe remporte alors de grandes victoires. Furlan gagne Milan-San Remo, le "jusqu'ici inconnu" Berzin remporte Liège-Bastogne-Liège. Mais surtout, à la Flèche wallonne, le podium est 100% Gewiss : Argentin, Furlan et Berzin. Du jamais vu ! Le lendemain, le docteur Ferrari reconnait utiliser l'EPO pour la préparation de son équipe (sa comparaison entre cette substance dopante et du jus d'orange restera célèbre).''

Plus tard, Armstrong reconnaîtra avoir rencontré le bien-nommé docteur Ferrari, sans admettre que celui-ci ait contribué à un quelconque effort de dopage de l'Américain.

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Intéressant ce que dit Greg LeMond à ce sujet. Cet autre américain a lui aussi gagné le Tour de France, trois fois en ce qui le concerne. Un médecin français a dit de LeMond qu'il était le seul gagnant des Tours d'après-guerre à avoir accompli l'exploit sans s'être dopé.

Vous pouvez jeter un coup d'oeil sur l'interview que LeMond a accordé à Bill McGann. On y trouve non seulement des informations biographiques, mais aussi des observations et des opinions de l'ex-champion. Qui, soit dit en passant, était effectivement aussi sympathique qu'on le dit avant l'interview, comme j'ai pu m'en rendre compte lorsque j'ai eu le privilège d'avoir une conversation avec lui quand je l'ai rencontré il y a quelques années à Toronto. Allez voir:
http://www.bikeraceinfo.com/oralhistory/lemond.html

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Au vingtième siècle, la musique classique n'a plus de classique que le nom. On continue de jouer les baroques, les romantiques et les impressionistes, mais les compositeurs encore vivants sont boudés par l'auditoire, à moins de reproduire les styles du passé. Dommage, on n'y trouve pas que des mauvaises choses, loin de là.

Comme je l'ai déjà écrit ici, Frank Zappa n'était pas simplement qu'un autre guitariste de rock mal rasé. Issu d'influences multiples, dont Edgar Varèse, ce compositeur prolifique a joué sur tous les terrains, utilisant les musiques les plus variées pour commenter la société qui l'entourait.

Ici, Zappa endosse le chapeau du compositeur/chef d'orchestre devant un auditoire allemand ravi. Les danseurs, eux, sont Donald Weikert et Louise Lecavalier, dans une chorégraphie athlétique de Édouard Lock. À cause de la nature exigeante de sa musique, Zappa a toujours été obligé de s'entourer d'excellents musiciens, et cette prestation ne fait pas exception. ''G-Spot Tornado''.


samedi 18 août 2012

PER CAPITA.


Un Falardeau Alu9 chaussé 700 x 32mm


La mainmise des Asiatiques sur la fabrication de biens de consommation exportés vers l'Occident est un phénomène dont il est souvent question dans les conversations, et aussi dans les médias. On parle souvent des maigres salaires versés aux employés, mais certains consommateurs savent en réalité bien peu de choses sur ce sujet.

En visitant différents pays asiatiques, on peut voir de grandes différences d'un pays à l'autre, et les propriétaires de compagnies, qu'elles soient asiatiques ou occidentales, choisissent leur(s) lieu(x) de fabrication en tenant compte de plusieurs facteurs. Le salaire n'est pas le seul critère et chaque pays a ses particularités.

Je me suis penché sur la question cette semaine, en regardant un tableau qui donne le revenu moyen per capita en 2011. Les chiffres sont fournis la Banque Mondiale. Ces chiffres varient d'une source à l'autre: le but ici n'est pas tant de savoir le revenu exact par habitant, mais plutôt de comparer les pays entre eux. D'abord, les chiffres en $USD puis, un bref aperçu de ce qu'on y fabrique. Taiwan n'est pas sur le tableau que j'ai consulté. Il s'y situerait autour de 32,000$ et on y fabrique de tout. C'est une source importante de produits de milieu et de haut-de-gamme. Et de nombreux industriels taiwanais ont ajouté une ou plusieurs usines à l'étranger en plus de leurs usines sur l'île.

PAYS, SALAIRE ANNUEL MOYEN, (PRINCIPALES MARCHANDISES PRODUITES)

Pakistan, 2880$ (gants)
Vietnam, 3260$ (cadres, pièces de bas-de-gamme)
Inde, 3620$ (tout, bas-de-gamme)
Thaïlande, 8390$ (pneus)
Chine, 8430$ (tout, surtout du bas-de-gamme)
Japon, 35,510$ (cadres et pièces, surtout du haut-de-gamme)
Canada, 39,830 (cadres de haut-de-gamme)
USA 48890$ (cadres et pièces de haut-de-gamme)


Il faut regarder ces chiffres sans perdre de vue que le coût de la vie est ajusté sur ces revenus, sans quoi les citoyens ne pourraient rien acheter s'ils gagnaient un très bas salaire tout en vivant en Occident. Mais certaines réalités locales peuvent échapper au regard d'un touriste pressé. Par exemple, au Vietnam, le coût de l'immobilier est démesurément élevé, comparativement à la Chine voisine. Par contre, une bonne partie de la diaspora vietnamienne envoie à chaque année des montants d'argent à leur famille restée sur place, ce qui contribue à enrichir le pays au-delà du strict revenu salarial, et à donner accès à la propriété à une classe laborieuse qui n'y aurait pas accès autrement.

Ce tableau aide à comprendre pourquoi, lorsqu'un industriel taiwanais veut avoir une usine à l'étranger, le Vietnam peut être plus attrayant que la Chine: les revenus sont nettement plus bas. Par contre, les infrastructures routières et autres sont insuffisantes, entre autres raisons parce que l'état peine à toucher les revenus fiscaux dont il aurait besoin. Les routes sont saturées et les camions mettent beaucoup de temps à couvrir les distances si on compare avec d'autres pays.

Je savais que Taiwan a des revenus moyens supérieurs à la moyenne asiatique. Mon voyage là-bas me l'a confirmé. Allez dans une épicerie de Taipei et vous verrez que les prix des denrées sont proches des nôtres au Québec. J'ai lu quelque part qu'un bon soudeur taiwanais peut avoir un salaire autour de 30,000$US. Les ouvriers non-qualifiés touchent moins, mais ça n'a rien à voir avec l'idée que beaucoup d'Occidentaux se font de Taiwan. Il ne faut pas confondre avec la Chine, pays voisin, mais différent et de bien des façons.

Un facteur dans la capacité des Asiatiques à vivre avec de bas salaires, c'est la collaboration à l'intérieur de la famille. Les gens partagent plus volontiers la même demeure et considèrent normal de garder les grand-parents à la maison au lieu de séparer les différentes générations. Ainsi, c'est moins cher, et il y a un partage des ressources bénéfique aux individus. À Taiwan, plusieurs entreprises ont commencé petites, en mettant en commun les ressources financières d'une même famille au lieu d'emprunter à la banque. Au fil des décennies, certaines de ces entreprises ont beaucoup grossi. La culture confucéenne valorise beaucoup la famille et l'éducation, et on la retrouve autant en Chine qu'au Vietnam et à Taiwan.

Un exemple, dans le domaine du vélo. Giant est la plus grosse compagnie de vélo au monde. Plusieurs cyclistes occidentaux pensent que la compagnie est américaine. Pas du tout: la maison mère est taiwanaise, même si elle possède des usines en Chine également. Ils ont fabriqué des vélos pour plusieurs compagnies occidentales avant de mettre en marché des vélos sous la marque Giant. Trek est couramment un de leurs gros clients, en plus de Scott, Colnago et Canyon.

En ce moment, plusieurs compagnies hésitent de plus en plus à faire fabriquer des marchandises en Chine. Les salaires ont augmenté depuis ces dernières années et non, la main-d'oeuvre locale n'est pas une ressource inépuisable. Les Chinois, comme les Vietnamiens et bien d'autres, n'aiment pas être loin de leur famille. En fait, s'ils sont prêts à s'éloigner vers des emplois industriels, c'est souvent dans le but d'améliorer leur sort et sur une base temporaire, parfois pour réinvestir l'argent patiemment économisé.

Les règles anti-dumping mises en place par certains pays occidentaux, comme le Canada ou l'Europe, ont un effet de déplacement des lieux de production. Le Vietnam recommence à produire vers l'Europe, actuellement, après une période de disette dûe à ces règlements maintenant levés. L'Europe de l'Est profite de tels règlements pour reprendre une partie de cette production destinée à l'Europe de l'Ouest. Certains industriels asiatiques ont même installé des usines en Europe de l'Est.

Je n'ai pas de fournisseur potentiel pour mes cadres au Québec ou au Canada. Les cadres abordables ne sont plus faits au Canada, on n'y trouve plus que des cadres artisanaux ou semi-artisanaux. Je serais obligé de vendre mes cadres aussi cher que les vélos complets que je vends actuellement. Concrètement, je n'en vendrais presque pas, ce qui n'est pas un détail, vous en conviendrez... Et les industriels canadiens qui fabriquaient des cadres abordables sur place jusqu'à il y a quelques années étaient généralement  des compagnies orientées vers la production de masse qui n'étaient pas intéressées de remplir mes besoins. Pendant ce temps je trouve facilement à Taiwan des producteurs qui m'offrent une qualité de cadre supérieure pour un prix qui n'a rien d'extravagant.

Les fournisseurs taiwanais qui travaillent pour moi ont des usines organisées pour un volume de production moyen ou petit, par les standards de l'île. Les grosses compagnies comme Giant, Merida ou Ideal ne sont pas intéressées par des petites commandes comme les miennes (une centaine de cadres à la fois). Kinesis se fait tirer l'oreille. Mes fournisseurs m'imposent souvent une surcharge à cause de mes commandes limitées, mais il s'agit seulement d'un montant qui, réparti sur chaque cadre, n'a qu'un impact très limité sur le prix final du vélo. L'équivalent d'un accessoire mineur.





Saint-Bernard, en Beauce.


 Bobo Stenson est un pianiste suédois né en Suède en 1944. Il a collaboré depuis 1963 avec un grand nombre de musiciens de premier plan et on le retrouve ici en trio piano/basse/batterie.


vendredi 10 août 2012

CE QUE LE MARCHÉ EST PRÊT À PAYER.


Que se passe-t-il quand on arrête de tondre le gazon? Ceci.


Dans un magasin, chaque année est un peu différente, ou même parfois beaucoup. Cette année, le printemps a eu ses hauts et ses bas, mais au moment où les affaires ont l'habitude de diminuer, ça tient bon. Côté réparations, la baisse a à peu près deux semaines de retard, et les ventes de vélos neufs n'ont pas encore commencé à diminuer. On se croirait en plein printemps, et un représentant d'un des plus gros grossistes canadiens me disait la même chose il y a quelques jours au sujet de l'entreprise où il travaille.

La raison? Pure spéculation, mais j'en vois deux possibles. Les ventes du printemps un peu inégales, combinées avec une température idéale pour le vélo cet été, quoique certains trouvent peut-être ça un peu chaud par moment... Les agriculteurs, entre autres: près du deux tiers des USA subissent une sécheresse et pendant ce temps, le maïs québecois n'a pas fière allure. Certaines bêtes d'élevage sont vendues en ce moment, car sinon elles n'auraient rien à manger l'hiver prochain. Les rivières, elles, sont à moitié vides. On nous annonce une fin de semaine pluvieuse, et certains s'en réjouiront.

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L'histoire de la compagnie Sun Tour est intéressante. Surtout la période des années '70 jusqu'à la débandade qui a mené à une reprise par des intérêts taiwanais. La compagnie a été fondée au Japon en 1912, et a participé de près aux débuts du vélo de montagne lorsque Campagnolo a refusé de fabriquer des transmissions et des freins pour ce qu'il percevait comme une mode éphémère.

Leurs pièces étaient toutefois moins attrayantes que celles de Shimano et je me suis souvent demandé pourquoi la compagnie Specialized s'entêtait à habiller ses cadres avec des éléments Sun Tour (dans les années '90). Je me doutais bien que c'était une question de $$$. Et voici ce que j'ai trouvé sur la page Sun Tour de Wikipedia:

''Unlike other bicycle component manufacturers, Suntour did not charge what the market would bear, but instead charged a price that covered costs of production plus a small profit markup. As a result, a Suntour derailleur costing $10 competed against similar level products from Campagnolo ($40) and Shimano ($20).  As Suntour derailleurs and shifters could be specified on many more low- and mid-priced bicycles, the company gained a reputation with the general public as a producer of only low-end equipment. This reputation would eventually hurt sales when Suntour introduced a complete high-end component group, Superbe Pro.''

Il faut dire que Shimano avait à peu près dix fois plus d'employés en recherche et développement, et que l'attitude y était beaucoup plus allumée sur ce qu'il fallait faire pour dynamiser l'entreprise.

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Établir des prix sur des marchandises n'est pas un art, quoiqu'on vous dise. Il s'agit plutôt de concrétiser une valeur sur un objet en tenant compte de plusieurs facteurs, et pas seulement de: combien en a-t-il coûté pour avoir l'objet ici, maintenant. Ce que les acheteurs sont prêts à payer (what the market will bear, voir ci-dessus), est justement un de ces facteurs. Certaines des roues modernes qu'on voit sur les vélos de haut-de-gamme sont probablement un bon exemple de cela, quoique je n'ai pas de chiffres précis là-dessus. Un autre exemple: certaines pièces en aluminium, italiennes, et finalement pas si italiennes que ça... Un dicton s'applique, ici: ''Ne sous-estimez jamais ce que les clients sont prêts à payer.''

Je suis en train de me livrer à un petit exercice de mise en marché en ce moment. J'ai mis en vente sur Internet des pédaliers de très haut-de-gamme, manivelles carbone, à un prix que je jugeais susceptible d'intéresser la clientèle potentielle. L'auditoire est large: les USA. Après deux semaines, rien de vendu. Je baisse le prix de x%. Après quelques jours, un Texan m'envoie la somme demandée. Maintenant je sais ce que le marché est prêt à payer.

Et ce qu'il est prêt à payer dépend aussi de ce qui est offert dans le marché. Un exemple: ces compteurs Cat Eye Adventure lourdement soldés cette année. Oui, les gps Garmin ont un prix de détail suggéré plus élevé, mais les caractéristiques qu'ils offrent, plus nombreuses, sont plus dans l'air du temps. C'est pourquoi le prix du Adventure Wireless est maintenant à peu près au niveau d'un Wireless de base. À vous d'en profiter...

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J'ai eu de la visite cette semaine, de Boston, Massachussets: la fille de www.bikeyface.com . Plutôt sympathiques, la fille comme le blogue. Allez voir le blogue, vous verrez.

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Plus tôt, cette semaine, sur les ondes de CBC Radio One, l'émission ''Q'' nous présentait un auteur qui parlait de la notion de décision. Il racontait entre autres choses que les personnes dont le budget est très serré, lorsqu'ils vont à l'épicerie pour faire le marché, dépensent beaucoup d'énergie à décider ce qu'ils achètent avec leurs ressources limitées. À tel point qu'ils arrivent à la caisse fatigués. Les gérants le savent et placent intentionnellement des aliments sucrés près de la caisse, ce qui peut être très tentant aux yeux de quelqu'un dont l'énergie est à la baisse.

Il est possible que la prise de décisions à répétition nous pompe plus d'énergie qu'on pourrait le croire à première vue. Et j'en ai beaucoup à prendre, petites et grandes, dans le cours d'une journée. Je me simplifie parfois la chose en faisant une liste écrite de toutes les tâches que j'ai à accomplir, et je laisse le hasard choisir celle que je ferai maintenant. En utilisant bien sûr mon jugement pour ne pas laisser les priorités de côté.

Il y a une décision qui est déjà prise longtemps d'avance: celle de s'entraîner, ou pas. Avec moi, c'est simple, c'est coulé dans le béton. Beau temps mauvais temps, on y va! Seule la maladie ou une cause vraiment majeure peut justifier un forfait. La personne avec qui je le fais couramment, en semaine, n'a pas besoin de téléphoner. Le rendez-vous est toujours le même, ça ne pourrait pas être plus simple.

Ce matin, il pleuvait. J'ai mis les vêtements que je jugeais approprié, et je me suis très vite rendu compte, comme je m'y attendais, que la sortie était très agréable. La pluie ne me gênait pas, et le froid était très relatif: la chaleur produite par l'effort m'a tout de suite rendu très confortable. Pour la enième fois, je me suis félicité d'avoir gardé le cap sur mon programme établi.

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J'ai écouté plusieurs fois l'album ''How to Become Clairvoyant'' de Robbie Robertson. J'ai aussi regardé sur youtube.com des versions ''live'' des pièces de l'album, que j'ai parfois montrées ici sur ce blogue. Je les aime, mais après mûre réflexion, je préfère quand même les versions de l'album. Comme c'est habituellement le cas pour le travail fait en studio, elles sont forcément plus fignolées. Ici c'est ''Axman''.

''I hear a guitar wail,
Until the break o'dawn
You know the axman was here...

Bring a tear to your eye...

Just dig that crazy sound!''








vendredi 3 août 2012

UN PAYS DE CHAMPS.


Cinq heures et demie du matin, Lac Sept-Iles, Comté de Portneuf.


Deux journées de tandem avec fiston en fin de semaine dernière, en tandem: Québec/Sainte-Marie de Beauce et Sainte-Marie/Québec. Température 26 à 32 degrés. Moyennes au compteur: 18.8 km/h le premier jour, 20.5 km/h le deuxième. Vents rarement favorables (voir message précédent).

Dixit Thomas, à Saint-Nicolas au retour:

-''J'ai l'impression d'être dans un autre pays.

-Ah oui? Quel pays?

-Je ne sais pas, un pays de champs...''

Nous étions dans un secteur où la terre est cultivée pour les fraises et, en général, les fruits et légumes.

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Et si vous vous inquiétez pour ma santé, nous avons fait, à trois cyclistes ce matin, un parcours de 34 minutes environ. J'étais en 700 x 23. Parcours surtout plat, à l'exception d'une côte d'à peu près un kilomètre de long avec un pourcentage de pente variant jusqu'à 13 ou 14%. La moyenne au compteur était de 29.0 km/h.

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La Chine est un gros, LE gros producteur de vélos actuellement, c'est bien connu. Quels sont ses clients? Dans l'ordre:

-USA.
-Japon.
-Indonésie.
-Russie.
-Malaisie.
-Iran.
-Arabie Saoudite.
-Canada.

Et on pourrait penser que la Chine n'importe pas de vélos, mais ce n'est plus vraiment le cas. Nous sommes au début d'une tendance: on commence à voir des Chinois qui achètent des vélos de qualité, souvent faits à Taiwan, dans un but récréatif. Le nombre de vélos est encore modeste, mais le pourcentage d'augmentation annuelle est considérable, et la valeur moyenne de ces vélos est supérieure à ce que les Européens importent du même pays. Les compagnies sont sensibles à ce phénomène, car le potentiel de croissance a de quoi faire rêver...

Pendant ce temps, Taiwan vend un peu moins de vélos que les années précédentes, mais puisque la valeur par vélo continue d'augmenter, le chiffre d'affaire augmente lui aussi. En fait, les marchés émergents comme la Chine font augmenter la demande, ce qui compense pour la baisse de demande qu'il y a en Europe. Dans celle-ci, la température et la situation économique ont été défavorables en 2011. Et en Belgique, la météo de 2012 ne sera pas tellement plus favorable: en juillet, ils ont eu 20 journées d'orage. Il faut dire que, traditionnellement, juillet y est le mois le plus pluvieux de l'année. Avis aux voyageurs...

Le Vietnam, lui, est redevenu un producteur/exportateur actif depuis que l'Europe a levé les sanctions anti-dumping qu'elle lui a imposées jusqu'en juillet 2010. En un an, il est passé de 13,000 à 226,000 vélos exportés vers l'Europe. C'est beaucoup, mais en 2004, avant les règlements, c'était 1.85 millions de vélos qui circulaient d'un vers l'autre.

En Europe de l'Est, la production a été multipliée par dix depuis l'an 2000. On y trouve à peu près une centaine de manufactures maintenant dans cette région. Mais l'attente (''lead time'') est longue avant de recevoir les cadres asiatiques et ces compagnies est-européennes n'ont pas commencé encore à fabriquer des cadres.

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J'ai parlé à quelqu'un récemment qui me demandait si ça serait une bonne idée de suivre un cours de mécanique, dans le but de pouvoir travailler comme mécanicien dans un atelier de mécanique vélo.

Évidemment, les connaissances que vous irez chercher dans un cours de mécanique ne seront jamais superflues. L'ennui, c'est que les connaissances constituent seulement qu'un aspect de ce que vous avez besoin pour faire ce métier. Vous aurez aussi besoin de développer une capacité à évaluer les tâches à exécuter, à partir de vos perceptions face au vélo qui est devant vous. Même si Shimano aimerait bien que vous le fassiez, vous ne pouvez pas changer tous les câbles de tous les vélos que vous réparez.

Pour acquérir cette capacité de diagnostiquer, il faut y mettre le temps. C'est inévitable, et il faut une bonne dose d'humilité quand on commence dans le domaine. D'autant plus qu'en plus de votre ignorance, il y aura vos distractions qui vous feront faire des erreurs absurdes à l'occasion. Tellement absurdes que vous en ferez de moins en moins au fil du temps.

Si vous ne faites que des réparations occasionnelles sur votre/vos vélos et ceux d'un ou deux amis, le métier ne rentrera pas. Pour cela il faut en faire beaucoup. J'insiste: beaucoup. Finalement, c'est comme dans bien des domaines, non?

La rapidité d'exécution varie passablement d'un mécanicien à l'autre. De plus, un technicien aguerri saura évaluer quand il faut s'arrêter de chercher la perfection, car certains vélos peuvent être très accaparants à cause de leur âge ou à cause de leur médiocrité initiale. Vous ne voulez pas que la facture de réparations soit plus élevée que la valeur du vélo.

Alors si vous m'offrez vos services pour devenir technicien/ne dans mon atelier, ne vous étonnez pas si je réserve mon évaluation de vos compétences pour plus tard, peu importe le ou les diplômes que vous puissiez exhiber.

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Branford Marsalis est peut-être plus connu pour son rôle d'accompagnateur dans le premier groupe de Sting lorsque ce dernier a dissous The Police. Mais c'est d'abord et avant tout un saxophoniste de premier plan, qui a fait ses premières armes en compagnie de son illustre frère Wynton. Il sera à l'émission ''Q'' de Jian Gomeshi, mardi le 7 août 2012 le matin, au 104.7 FM ou au www.cbc.ca/q/

Avishai Cohen se rappelle: