Quand je vous dis que Québec est côteuse, c'est vraiment vrai!
J'ai longtemps roulé sans dérailleur durant l'hiver québécois. Avec différentes formules monovitesses: frein rétropédalage, pignon fixe, roue libre monovitesse, roue libre multivitesse dont un seul pignon est utilisé. J'ai aussi possédé un vélo équipé d'un moyeu à vitesses internes, mais mes essais d'été ne m'ont pas donné envie de m'en servir l'hiver.
Puis j'ai fait l'expérience de la présence des dérailleurs avant et arrière classiques et je ne reviendrais pas en arrière, compte tenu de toutes les côtes qu'il y a ici et du fait que je ne rajeunis pas. De plus, les différentes formules monovitesses imposent une gestion d'une sorte ou d'une autre de la tension de chaîne et je suis heureux de ne plus avoir à m'occuper de cela. Voici quelques idées sur la question.
D'abord, je n'utilise pas de dérailleurs dispendieux. Car même si je n'ai pas besoin de les remplacer souvent, je le ferai plus volontiers avec du matériel bon marché. Par exemple, les séries Altus peuvent très bien faire l'affaire. Je n'utilise pas non plus de transmission à 8 ou 9 pignons: 7 ou même 6 peuvent faire l'affaire. En autant que les pignons extrêmes de ma roue libre conviennent à mes besoins, je suis heureux. Et n'allez pas croire que puisque ça ne coûte pas cher, ça ne fonctionne pas bien.
D'ailleurs souvent, les problèmes ne viennent pas des dérailleurs mais plutôt des câbles/gaines qui circulent mal à cause du vieillissement et des intempéries. Il faut les remplacer sans hésiter, d'autant plus que si vous faites le travail vous-même, c'est une réparation particulièrement abordable.
Lubrifiez vos dérailleurs souvent, au niveau des rivets, du ressort et des galets. Vous pouvez utiliser une huile plutôt liquide (peu visqueuse) à cause de son meilleur pouvoir de pénétration, ou un produit en aérosol à base de pétrole distillé comme du WD-40.
L'escalier du Cap-Blanc. En fait, seulement une petite partie.
Les deux dérailleurs (avant et arrière) ont chacun un ressort qui les ramènent en position de repos si on débranche le câble. Le tirage du câble lutte contre cette tendance et le soir, je dépose mon vélo avec une position des dérailleurs où je peux amener la chaîne vers un plus gros plateau ou un plus gros pignon. La raison étant que si je fais l'inverse, la force du ressort pourrait être insuffisante compte tenu des intempéries et du froid qui agressent parfois le vélo pendant la nuit. Le matin, il suffira d'actionner les leviers pour que le câble (et les dérailleurs) retrouvent leur mobilité normale à cause du tirage vers du plus gros. Notez que les dérailleurs arrière inversés fonctionnent à l'envers des autres, mais ces modèles ne sont pas fréquents. On ne trouve ces modèles que chez Shimano et votre vélo est probablement équipé d'un modèle classique dont le nom en anglais est top normal, par opposition à rapid rise ou low normal. En français: régulier, versus inversé.
Ça n'arrive vraiment pas souvent, heureusement, mais il y a des jours où le dérailleur arrière ne collabore pas. C'est souvent dû à l'accumulation de glace sur les pignons voisins de celui qui est utilisé. Si on ne peut pas rentrer le vélo à l'intérieur pour déglacer tout ça, on pourrait toujours faire couler de l'eau chaude sur la glace pour la faire partir, mais je n'ai jamais fait ça et je le dis avec prudence car je ne suis pas si sûr que c'est une démarche sans conséquence négative. Ce que je fais à ce moment-là, je me contente simplement d'utiliser seulement le dérailleur avant, ce qui me donne quand même trois vitesses bien étagées (dans le cas de mon vélo).
Parfois, le dérailleur avant rechigne à aller sur le petit plateau. Montrez-lui qui est le patron/ne! Arrêtez-vous en sécurité, placez-vous devant le côté droit du vélo, mettez le levier en position petit plateau et pesez latéralement sur le dérailleur fautif avec votre botte pour l'amener là où vous le voulez. Gentiment, mais fermement. Une fois descendu sur le petit plateau, le câble le ramènera sans peine sur un plus gros plateau et il y a de bonnes chances que ce problème soit réglé pour la journée.
D'autres fois, le dérailleur arrière ne veut pas descendre d'un gros pignon à un plus petit. Ça m'est arrivé hier. J'ai simplement, tout en roulant, exercer une petite pression avec le pied sur ce dérailleur pour le faire bouger vers un plus gros (oui, plus gros) pignon. Après, le problème est disparu. Ça tient parfois à peu de choses.
Si j'ai abandonné les différentes formules monovitesses, c'est que chacune d'entre elles comportaient des inconvénients, en plus du désavantage d'être monovitesse. Tout ce qui est technique est source de compromis, et les dérailleurs ne font pas exception à cette règle. Et si vous avez eu une mauvaise expérience dans le passé avec les dérailleurs, ça ne veut pas dire que tous ceux qui ont des dérailleurs en hiver au Québec en auront une aussi mauvaise. Moyennant ces quelques précautions, ça devrait bien se passer.
Les vélos possédés par ceux qui travaillent dans l'industrie du vélo sont très variés, et souvent plus intéressants que les autres. Mais il paraît que celui-ci ne roule pas beaucoup. C'est un cadre soudé à Québec (Saint-Augustin), probablement au début des années '80. La potence, le guidon et la selle ne sont pas d'origine. C'était un modèle d'entrée de gamme de Mikado, avec les jantes en acier. La sélection naturelle a eu raison de ce type de jante sur tous les vélos (sauf les pires).
Ça brasse beaucoup dans le domaine du commerce de détail, en ce moment. Et dans d'autres domaines aussi, car Internet bouleverse plusieurs métiers.
C'est un sujet régulièrement abordé par le magazine Bicycle Retailer and Industry News, qui est en quelque sorte la place publique des intervenants de l'industrie du vélo en Amérique du Nord (principalement).
La présence d'Internet se fait sentir surtout dans les vélos et les pièces de haut-de-gamme. Les détaillants locaux doivent agir pour tirer leur épingle du jeu, malgré tout. Quand je vois certains conseils qu'on leur donne, je souris. J'ai déjà procédé en ce sens sur plusieurs points, sans qu'on ait à me le dire, avec mon instinct de survie professionnelle et mon expérience comme guides.
Par exemple, un éditorial publié en novembre dans ce magazine suggère entre autres choses de diminuer les frais d'opération de nos magasins de 25% d'ici 2020. Personnellement, je les ai coupé de plus que ça, depuis huit ans. J'ai survécu à ça et, en bonus, ma qualité de vie s'est améliorée.
Au centre, un cadre soudé à Montréal (Lachenaie) à peu près à la même période que le Mikado plus haut. Équipé Campagnolo pré-index.
"Le monde a changé. On ne retournera pas en arrière. Les canaux de vente multiples (gros et détail) sont une réalité. Et les vendeurs qui s'inquiètent de leur survie dans le marché d'aujourd'hui devraient garder ceci à l'esprit: Trek, Specialized et Giant - tous les fournisseurs, en fait - ne sont pas vos partenaires ou vos copains. Plus probablement, ils sont votre banquier. Si vous n'êtes pas capable de vous confronter à leurs paramètres discutables (murky metrics), ils vous jetteront comme si vous étiez les vidanges d'hier...
...Pour les détaillants qui s'offusquent comme des vieilles filles au sujet des changements dans le monde du commerce de détail, c'est le temps de faire un homme de vous (time to man up). Les REI de ce monde sont là pour rester. Les ventes sur Internet ont changé la façon dont le monde voit les affaires. Alors détaillants: devenez agressifs sur le web; creuser les médias sociaux comme si c'était une mine d'or; bâtissez une communauté et faites de votre magasin un centre d'activité. Vous avez un boulot difficile, c'est certain, mais vous n'êtes pas seuls. Chaque établissement de détail dans chaque industrie fait face aux mêmes défis, alors regardez en dehors de la boîte de temps en temps. C'est bon pour les affaires."
Je sens que ça va faire réagir. Et pas seulement les vieilles filles et les personnes qui pensent qu'on ne devrait pas dire que c'est le temps de faire un homme de soi. Plusieurs détaillants vont envoyer leur grain de sel au courrier des lecteurs.
Personnellement je reste convaincu que les pratiques des fournisseurs/fabricants/grossistes de vélos, qu'ils soient gros ou très gros, désavantagent les détaillants en les déresponsabilisant et en les faisant payer pour un travail qui devrait être fait par eux plutôt que par une corporation qui de toute façon est surtout redevable envers ses actionnaires. Elles désavantagent également les consommateurs en les attirant avec des faux besoins et en créant des mythes qui ne servent qu'elles, ces corporations. Des cyclistes qui paient cher pour être déçus, il y en a quand même pas mal, par les temps qui courent.
Je n'ai rien inventé en fabriquant des vélos à Québec. La famille Poliquin (Mikado et Poliquin) l'ont fait avant moi et ailleurs au Québec d'autres détaillants et/ou grossistes l'ont fait, comme Giuseppe Marinoni dont l'usine accueille les consommateurs.
Un commentaire vaut la peine d'être expliqué, surtout si vous ne travaillez pas dans le domaine: "Plus probablement, ils sont votre banquier." Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement?
Une très grosse partie des vélos neufs que vous voyez chez les détaillants ont été commandés à l'automne et ne sont payés que le printemps suivant, en trois versements: avril, mai et juin. Ce qui revient à dire que c'est la compagnie de vélo qui finance cet inventaire. Un peu comme un banquier, sauf qu'au lieu d'avoir douze versements égaux au fil de l'année, ce sont trois paiements qui correspondent à la haute saison de vente ici en Amérique du Nord. D'où l'intérêt pour le détaillant d'avoir un printemps pas trop gris, pour stimuler l'intérêt des consommateurs...
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Je vous laisse avec Arvo Pärt, et j'en profite pour vous souhaiter un bel hiver. Je pars en vacances bientôt. Je serai au magasin lundi pm le 8 décembre, après quoi je ne promets rien... Je ne sais pas encore quelle est la date du prochain message sur ce blogue.
Voilà une bien utile mise au point au sujet des dérailleurs. Avec la température de ce matin, le mien était gelé dur. Je croyais que mon idée du séchoir à cheveux étsit bonne... Envore eut-il fallu que j'élimine totalement l'humidité et pas seulement fondre la glace. Car une fois reparti, au bout de 500 mètres, ça a gelé à nouveau. Je vais retenir le conseil du WD-40.
RépondreSupprimerBonjour Nicolas,
RépondreSupprimerLe nom WD-40 vient de l'expression anglaise Water Displacement. Le produit aurait probablement aidé. Aussi, une utilisation intensive durant les premiers mètres aurait pu le dégêner de manière plus ou moins durable. À l'opposé, une autre approche consiste tout simplement à toujours le mettre au lit, le soir, sur un pignon qui peut être passe-partout, quitte à n'utiliser que le dérailleur avant si le matin venu le tout est inutilisable tel quel.