samedi 23 mars 2013

ÇA NE SUFFIT PAS.






Ce n'est pas l'Égypte, c'est la Côte de Beaupré.


C'est un métier, et on ne s'improvise pas mécanicien de vélo. Il faut y mettre le temps, et il y a beaucoup à apprendre.

Une des choses qui différencient le mécanicien d'expérience du débutant, c'est la vitesse d'exécution des tâches. Pas seulement parce qu'il travaille plus vite, mais aussi parce qu'il connaît des solutions simples à des problèmes qui ne sont pas toujours complexes...

Ce matin, un client m'apporte un vélo neuf sur lequel il a essayé de mettre un deuxième porte-bouteille. Problème: interférence entre le collet du dérailleur avant et le porte-bouteille, là où la vis inférieure serre l'objet contre le cadre.

Il serait toujours possible de descendre le collet rapporté du dérailleur avant de type braze-on et refaire les ajustements pertinents, mais il y a beaucoup plus simple que ça. On installe deux espaceurs entre le porte-bouteille et les deux trous de vis du cadre, ce qui éloigne juste assez le porte-bouteille pour éviter l'interférence.

Bien sûr, souvent, c'est la familiarité avec la tâche qui fait la différence. Un exemple: le dévoilage (défaussage) des roues. À moins de travailler sur une roue à problèmes (trop vieille, trop bon marché, ou les deux), le processus est simple: identification des rayons concernés, tensionnage de ces rayons, confirmation du résultat et amélioration additionnelle si nécessaire. On diminue les tolérances jusqu'à ce que ça devienne inutile d'intervenir davantage.

Les débutants qui s'attellent à cette tâche sont hésitants, et on peut comprendre. Ils n'ont pas encore pris l'habitude de visualiser la conséquence de leurs gestes durant le processus, et ils ont peur d'empirer la roue comme tant d'autres l'ont fait avant eux sur d'autres roues.

Un mécanicien d'expérience aura parfois du fil à retordre sur certaines roues, bien sûr, mais souvent la procédure peut être exécutée en moins de cinq minutes. Parfois même en moins de deux minutes. Alors que je me rappelle avoir entendu un client me dire qu'il y avait mis tout l'après-midi et qu'à la fin la roue était pire qu'au début. Bon, on s'entend, il ne l'avait jamais fait, et il n'était pas outillé correctement comme un mécano débutant va l'être s'il est dans un atelier professionnel.

J'ai déjà entendu un candidat au travail de mécanicien me dire fièrement qu'il était habitué de démonter des vélos. Mais démonter, c'est la partie facile. Est-ce qu'il remonte, aussi? La capacité à faire de bons réglages est plus exigeante qu'avant, à cause entre autre de l'indexation des dérailleurs, particulièrement le dérailleur avant. Il faut connaître tous les paramètres concernés, sinon on n'arrive pas à faire un travail vraiment correct et complet. Avoir une vague idée de la tâche à accomplir, ça ne suffit pas.

C'est pourquoi les mécaniciens d'expérience, dans ce domaine, sont recherchés. Ils peuvent plus ou moins choisir l'endroit où ils travaillent, d'autant plus que, souvent, ils développent une relation avec une ou plusieurs personnes à l'intérieur d'un atelier de réparation/assemblage et peuvent profiter du printemps pour intégrer l'équipe. Malheureusement pour nous, au Québec, l'hiver fait en sorte qu'il n'y a pas assez de travail pour toute l'équipe de la belle saison lorsque le froid revient.

Voilà donc une raison de plus de faire préparer son/ses vélo/s à l'automne ou en hiver en vue du printemps: les techniciens qui restent en place durant les saisons froides sont habituellement les plus expérimentés. Les autres ont dû passer à autre chose et, d'ailleurs, souvent ne reviennent pas. Ils n'accumuleront pas assez d'expérience et de connaissances pour maîtriser le sujet. Et acquérir de la vitesse d'exécution. Ce dernier point n'est pas très important si vous réparez le vélo de votre cousin ou de votre voisin. Mais si, cette semaine, vous aviez trente vélos à préparer, vous verriez les choses autrement...

Au Vietnam, on me dit que l'approche est radicalement différente. Si vous voulez devenir un apprenti, peu importe le domaine, vous devez payer. Pas comme au Québec où vous serez payé. Et on peut comprendre leur point de vue: le maître va-t-il vouloir enseigner à l'élève qui va devenir un compétiteur de plus? Ces dernières années, certains candidats sont venus faire un stage dans mon atelier en automne, sans être payés, simplement pour apprendre. Cette formule a un avantage: vous faites vos premières armes dans un contexte sans pression, puisque le volume de travail est moins important et le patron n'a pas peur de ne pas en avoir pour son argent...

Ceci dit, je n'écris pas tout ça pour vous décourager. Si la chose vous intéresse, c'est un métier qui en vaut bien d'autres. J'ai commencé moi-même en réparant le mien, puis en faisant un peu le commerce de vélos d'occasion que je revendais après remise en condition. J'ai ainsi fréquenté assidûment une boutique qui me fournissait en pièces et le patron me connaissait déjà lorsque je lui ai offert mes services. Je ne lui ai d'ailleurs même pas remis de c.v. ce jour-là: il n'en avait rien à cirer et je le savais très bien. Le lendemain matin, ma vie a changé.



       Tournage de cinéma sur la rue Père-Marquette à Québec.



''The flooding of New Orleans was a man-made catastrophe. A federal fuck-up of epic proportions, decades in the making.''. C'est ce que déclare un personnage dans ''Treme''. Allusion, entre autres choses, à la planification des digues protectrices de la ville.

Les téléséries me passent comme de l'eau sur le dos d'un canard. Pourtant, j'aime le cinéma, mais pour une raison quelconque, les téléséries, c'est différent. ''Treme'' est l'exception qui confirme la règle.

C'est bien sûr surtout à cause du sujet: la Nouvelle-Orléans et l'ouragan Katrina. Si, à vos yeux, New Orleans n'est qu'une ville parmi d'autres, Katrina un ouragan parmi d'autres, alors permettez-moi d'attirer votre attention sur une réalité qui n'est pas un détail: peu de villes ont réussi à exporter leur culture autant qu'elle. Une culture métissée, forte et originale.

Imaginez une minute que la Nouvelle-Orléans n'aurait pas existé, ainsi que la région du Mississipi voisin qui ont donné naissance au blues et à toutes les musiques voisines. Ces musiques ont été l'influence majeure du rock, et d'une manière générale la plupart de la musique populaire moderne. Elvis, les Beatles, les Stones, Chuck Berry, Jimi Hendrix, Eric Clapton et tous ceux qui les ont suivis et imités.

L'idée qu'on a de la Nouvelle-Orléans est trop souvent figée dans le temps: les vieux de la vieille qui jouent Oh When the Saints et les autres... Pourtant, cette ville ne s'est pas arrêtée de vivre et d'évoluer, et les clients des bars ne sont pas tous des touristes en mal de clichés, loin de là.

Treme vous balade à travers toute cette faune qui trime dur chaque jour pour rebâtir après la catastrophe, malgré les ressources limitées, malgré les gouvernements, malgré l'ampleur du désastre. Elle vous balade dans leurs moments de joie et de plaisir, souvent le soir, la nuit, folk, rock, blues, gospel, blues aussi, bien sûr. Et elle n'aurait pas autant de crédibilité sans les apparitions d'authentiques musiciens qui jouent leur propre rôle, tels que Ron Carter, les frères Neville, Delfayo Marsalis, Trombone Shorty, Fats Domino et plusieurs autres. Quand on voit un musicien qui joue, dans Treme, la caméra montre ses doigts aussi, pas seulement son visage.

L'attachement que les habitants de la Nouvelle-Orléans, et même certains qui n'y habitent pas, ont pour leur ville est omniprésent dans chaque épisode. Et il suffit de prendre le temps de regarder pour comprendre pourquoi. La série est couramment diffusée sur Super Écran (Vidéotron) ainsi que d'autres cablodiffuseurs, et vous pouvez aussi visionner différents extraits sur youtube.com. On n'a pas même pas vraiment besoin de regarder depuis le début pour en saisir le sens, et le montage est très serré: on passe d'un (ou plusieurs) personnage(s) à l'autre à une cadence rapide.

Le ''Dubya'' dont il question dans la chanson suivante n'est nul autre que George Dubya Bush: ''Shame, Shame, Shame'', extraite de Treme.





Le type qui parle du ''federal fuck up'' n'a pas la langue dans sa poche. Regardez ceci et vous serez d'accord avec moi.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire