Le vélo de Thi:
Le vélo ci-dessus vous paraît probablement assez banal, si vous êtes un cyclosportif occidental. Il ne l'est pas. Pourquoi?
Quand j'ai connu Thi, mon beau-frère, il n'était pas particulièrement sportif et, comme la plupart des hommes vietnamiens, c'était un fumeur quotidien. Il se déplaçait sur une petite moto (50 cc) car il la préférait aux vieux vélos très (trop) économiques qui étaient disponibles dans la maison.
On ne peut pas en vouloir aux Asiatiques de bouder les vélos qu'ils ont connus dans leur enfance. J'ai personnellement travaillé une fois sur deux de ces machines, pour les remettre en bon état. Mais la notion de bon état est très relative ici, puisque toutes les pièces sont tellement économiques qu'il devient difficile de rendre vraiment fonctionnels les différents éléments de la machine. La qualité d'acier, les gaines de câbles, la précision du machinage, tout est fait avec un tel souci de l'économie que le résultat ne peut faire autrement qu'en pâtir. Normal, avec le niveau salarial typique du Vietnam des années '90 (et avant), on ne pouvait proposer autre chose.
Le salaire moyen au Vietnam, comme en Chine, est en progression. Le niveau de consommation est moins limité qu'auparavant et c'est pourquoi on voit moins de vélos et plus de petites motos. Même dans une ville moins industrialisée comme celle de Thi: Hué. Et le vélo récréatif, parallèlement, a fait son apparition. Le cas de Thi n'est pas si rare en Asie, alors qu'il y a vingt ans, seuls quelques coureurs amateurs s'équipaient de machines dont la qualité variait énormément. Vraiment énormément...
Celui de Thi est d'une marque asiatique probablement inconnue en Occident. Il s'agit d'un cadre en aluminium assez basique habillé de pièces sans surprises. Oubliez vos critères habituels: pas de Shimano 105 ici. Le but de la transmission n'est pas d'impressionner les voisins, mais bien de faire avancer le vélo, sans investir plus qu'il ne le faut vraiment. Les leviers de vitesses? Au cadre (tube oblique), bien sûr. Les dérailleurs sont de Shimano, mais très abordables.
Si vous êtes consternés par toutes ces pièces génériques, dites-vous que c'est pourtant un pas de géant dans la vie de ces gens qui, il n'y a pas si longtemps, n'auraient jamais envisagé de mettre un tel montant sur un vélo. Et cela reflète un souci de la santé qui ne peut qu'être bénéfique. Thi s'en sert tous les jours, et je m'en réjouis. Allez, il ne te reste plus qu'à arrêter de fumer, maintenant!
Shimano a vu ses ventes progresser quelque peu durant les six premiers mois de l'année. C'est l'Europe qui est son principal marché, mais la température là-bas n'était pas très favorable. En Amérique du Nord, ça a été plutôt lent à démarrer, pour la même raison. Le Japon, aussi.
C'est en Chine que ça progresse le plus. Ce pays est en tête des marchés émergents dont Shimano peut profiter et cela compense pour les lourdeurs du marché occidental. 80% des revenus de la marque provient des pièces de vélo, le reste venant des ventes de produits destinés aux pêcheurs (moulinets, etc.).
Un autre facteur joue: la dépréciation du yen, la monnaie nationale, ce qui favorise les exportateurs japonais. Alors qu'en 1994, le phénomène inverse avait permis à SRAM de prendre une part de marché, maintenant le yen favorise les exportateurs japonais. Il sera intéressant de voir, dans les années qui viennent, si la valeur de la monnaie chinoise s'apprécie, ce qui est possible, étant donné que sa valeur actuelle a été maintenue artificiellement basse par les autorités chinoises. Mais la pression internationale est forte pour que les choses changent, car plusieurs pays considèrent que c'est une injustice. De leur côté, les dirigeants chinois déclarent que le système financier international doit être revu car le dollar américain ne mérite plus la place qu'on lui donne encore. À suivre...
Pas très loin de Saint-Léon-de-Standon, en septembre 2013.
J'ai reçu un courriel cette semaine d'un lecteur ayant fait un peu le même exercice que moi, la semaine dernière. C'est-à-dire, une description point par point, plus exhaustive que la mienne, de son vélo. De ses vélos, en fait, car il voyage en famille. Vous pouvez voir la description sur:
Petit détail: les moyeux XT sont de type scellés mais il y a confusion autour de la signification de ce terme. Scellé ne veut pas automatiquement dire cartouches.Certains utilisent l'expression "semi-scellé" pour indiquer un roulement cône-cuvette, donc pas cartouche, sur lequel on a pris soin d'installer un accessoire qui prévient l'entrée de l'humidité lorsqu'on roule dans de mauvaises conditions. Les moyeux Shimano vendus séparément sont de type cônes et cuvettes (pas de type cartouche) et doivent être ouverts une fois de temps en temps. Et Shimano ne garde pas indéfiniment les axes/cônes de rechange pour chaque génération de moyeux. Ma perception, c'est qu'il y a si peu de cyclistes qui font entretenir leurs moyeux (ou qui le font eux-mêmes), que la demande pour ces pièces diminue beaucoup au fil des ans et ce n'est pas motivant pour Shimano d'inventorier de telles choses. Remarquez, si une jante est endommagée, la roue n'est habituellement pas rebâtie à partir d'un bon moyeu qui le justifierait, on passe simplement à une nouvelle roue, complète avec moyeu neuf inclus. Personnellement, si j'avais un moyeu XT en bon état avec une jante en fin de carrière, je préfèrerais le garder et m'acheter seulement jante et rayons. Ce serait très différent avec un moyeu d'entrée de gamme, ou avec un moyeu haut-de-gamme usé dont je ne peux remplacer les roulements.
Appalaches en septembre.
Autre petit détail. Les roulements cartouche se sont généralisés ces dernières années, dans les moyeux de haut-de-gamme. Très fluides, et nécessitant peu d'entretien, ils ont la cote. Alors pourquoi continuer de proposer des roulements cônes-cuvettes comme Shimano et d'autres le font sur les moyeux vendus séparément? Une des explications qui m'a été donnée concerne un point fort du système cône-cuvette: en anglais, on appelle ça la résistance aux "side loads" (donnez-moi la traduction en français si vous la connaissez). Lorsqu'un cycliste penche son vélo, le stress qui pèse sur les roulements vient en diagonale, au lieu de la verticale habituelle. Les roulements cartouche seraient moins adaptés à ce genre de stress, alors que la bille, elle, à cause de sa sphéricité, est indifférente à l'angulation en question. Je ne saurais dire à quel point ça pèse dans la décision de Shimano, mais chose certaine, c'est que si la fluidité est votre critère prioritaire, vous pouvez vous procurer des moyeux très satisfaisants autant dans une catégorie que dans l'autre, chez Shimano comme ailleurs.
Quand je parle de moyeux vendus séparément, je fais allusion à ces moyeux Alivio, 105 et autres Deore LX que l'on peut se procurer sans montage complet de la roue. Shimano propose également des roues complètes, identifiées selon des séries comme 105 ou Dura Ace, qui ont des moyeux différents de ce qui est vendu séparément.
Jérome Beaulieu, "La Chute". Un des meilleurs au Québec, de l'avis de plusieurs.
Bonjour Paul,
RépondreSupprimerEntendre parler de l'histoire de Thi me rappelle de beaux souvenirs vécus au Vietnam il n'y a pas si longtemps...et ça me fait drôlement sourire de me rappeler de ces sportifs la cigarette au bec !
Side load pourrait être traduit par force axiale.
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