vendredi 27 mars 2015

ENTRETENIR LA CONFUSION.










Je pourrais faire comme les Parisiens et appeler ça du bike wrapping, ou tout simplement du wrapping, mais je cherche une alternative en français. Je parle, et ce n'est pas la première fois ici, d'un film vinyle habituellement utilisé par des automobilistes souhaitant mettre en valeur leur trophée sans avoir recours à une peinture traditionnelle. Avec en prime une protection de la peinture originale qui reste en place. Donc, appelons ça un film, même si une personne qui ne sait pas de quoi je parle, ne le saura pas plus après m'avoir entendu parler de film. Une suggestion quelqu'un? Voici où en est mon inventaire de couleurs/finis disponibles. J'ai également du blanc nacré, du blanc fibre de carbone et du rouge mat en inventaire. Notez que cette photo est reproduite au naturel, je n'ai pas modifié les couleurs après la prise de vue.




Je vous en ai déjà montré un exemple, et en voici un autre. Comme je m'y attendais, le résultat va en s'améliorant. Le diable est dans les détails: certains tubes aux formes moins classiques présentent un défi mais je compte bien persévérer pour faire en sorte que le tube diagonal de certains cadres soit aussi réussi que les autres. En attendant, le coup d'oeil en vaut la peine, à mon humble avis, comme par exemple dans le cas de ce vélo dont le cadre était uniformément rouge avant le filmage.





On peut aussi se contenter de mettre de simples accents à certains endroits précis. Comme par exemple ici, pour faire un rappel de la couleur rouge présente ailleurs sur ce vélo. Et un avantage de cette technique est qu'on peut retirer facilement cette bande de couleur dans le cas où un client intéressé par ce vélo souhaite une couleur uniforme sans accent.





Un de mes lecteurs m'a apporté cette semaine une jante. Il avait lu ce que j'ai écrit récemment au sujet des jantes profilées et celle qu'il avait entre les mains en était un bon exemple. Je ne l'ai pas mesurée, mais on pouvait se douter que ce n'était pas léger. Et c'était pire que ça: 980 grammes pour une jante de 700c! Quand je pense que le poids total des deux jantes de mon vélo polyvalent est de 931 grammes, et même 875 grammes dans le cas de mon vélo cyclosportif, on peut comprendre pourquoi j'ai fait ces choix-là. D'autant plus que les jantes sont réputées pour être un des endroits où le poids a le plus d'impact sur un vélo.

Parlant de jantes, j'ai lu un autre article abordant le sujet dans un magazine dont il était question ici il y a peu: Bike Tech. Publié en octobre 1983, l'article s'intitule "Heat-Treated" Rims - Are They Worth The Money?
Dans la première partie de l'article, on peut lire les phrases suivantes:

"...la recherche de roues plus durables a provoqué l'apparition de ce qui est communément appelé les jantes "heat treated" (traitées à la chaleur).

Ces jantes sont beaucoup plus dispendieuses que les jantes ordinaires, alors j'ai décidé de trouver pourquoi. Ce que j'ai découvert, c'est que ces jantes soi-disant traitées à la chaleur ne le sont pas, et qu'elles ne sont pas tellement meilleures que les jantes ordinaires."


S'ensuit un texte très intéressant sur ce qu'est un traitement à la chaleur ainsi qu'une description du travail à froid qu'on peut faire subir à un métal pour augmenter sa force.

Lorsqu'il est question de traitements de chaleur à propos des différents métaux, on parle de recettes très explicites correspondant non seulement à un métal donné, mais aussi à la variante du métal en question. Tout fonctionne sur la base de chiffres dans ce domaine. Par exemple, un aluminium 6061 T6 sera traité X minutes à Y degrés Celsius et ramené à une température ambiante selon un protocole bien déterminé.





Guy Martin est un réparateur de camions/coureur moto/présentateur télé. Son accent de Grimsby pourrait peut-être lui nuire lors de l'audition. En effet, la rumeur circule qu'il pourrait remplacer Jeremy Clarkson à la tête de l'émission Top Gear qui était présentée avec grand succès par la BBC. Jusqu'à ce que Clarkson donne un coup de poing de trop.







Après une analyse professionnelle des métaux utilisés sur trois différents marques/modèles de jantes, l'auteur s'est aperçu que ces jantes sont faites d'un alliage d'aluminium de type 3004 qui ne peut pas, ne doit pas être traité à la chaleur! Bien entendu, les compagnies concernées se gardaient bien de révéler cette information. Et il s'agit de compagnies de premier plan dans l'industrie du vélo.

Par contre, ces jantes sont anodisées dures, un traitement qui change l'apparence du métal, habituellement vers une couleur brune ou noire. Qui contribue au potentiel de confusion.

La confusion est entretenue par la nature même de la relation entre le manufacturier (dont la publicité n'explique habituellement rien ou presque) et le consommateur. Quelque part dans l'article on nous dit:

"Alors le travail d'informer le consommateur est laissé à des vendeurs qui obtiennent leur information d'importateurs qui obtiennent la leur de représentants de manufacturiers dans un anglais avec un lourd accent."

Le problème ne se limite évidemment pas au monde du vélo. Il semble bien que la publicité, en général, a démissionné de son rôle éducatif, pour se concentrer sur les émotions des consommateurs.

Pour votre information, les séries d'aluminium utilisées couramment pour faire des jantes, du moins à l'époque où l'article a été écrit, sont identifiées par les chiffres 2000, ou plutôt 2XXX, 6XXX, et aussi 7XXX. Comme dans 7005, un aluminium très utilisé pour fabriquer des cadres de vélo. Et non, le chiffre plus élevé ne signifie pas une qualité plus grande.

Si la chose vous tente, vous pouvez aller sur la page suivante:
http://www.euralliage.com/alliage.html#ancre663657

Et consultez le point suivant:
Sommaire
5. Caractéristiques typiques des alliages et des états de livraison.





Nous avons eu du plaisir à rouler le dimanche 16 mars dernier. Les jours précédents nous avaient donné une bonne accumulation de neige au sol et certains endroits étaient très divertissants. Dans la vidéo suivante, on peut voir un vélo aux pneus de 26 x 1.5 faire son chemin. Peut-être que mes 700 x 30 plus étroits auraient réussi à me faire passer, surtout avec un changement de vitesse au bon moment.



La vidéo qui suit présente deux pièces. J'ai bien aimé la première, mais attendez d'entendre la deuxième. Montez le volume et laissez-vous Fenderiser (comme dans: défriser).

vendredi 20 mars 2015

DU SPORT À PETIT BUDGET.












En avant-plan, l'Amérique moderne. En arrière-plan, le fleuve Saint-Laurent et l'Île d'Orléans avec son patrimoine.


La Route Verte, ce réseau cyclable québécois dont le coût d'entretien se chiffre à 2.8 millions de dollars par année, est une autre victime de la médecine austère du Docteur Couillard. Une phrase a retenu mon attention, dans l'article suivant publié en décembre dans le journal montréalais Le Devoir, car elle met en perspective les priorités du gouvernement.


http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/427357/velo-une-route-verte-patrimoniale


Il peine à réaliser que la survie de ce réseau, qui coûte quelques millions par année d’entretien, soit menacée, alors que le gouvernement s’apprête à investir près de 600 millions pour le prolongement de 8 km de l’autoroute 19. 



*


Un article a été publié lundi dernier dans le journal Le Soleil, ici à Québec, pour parler de la domination de l'automobile comme moyen de transport dans la région. 


http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/transports/201503/15/01-4852411-lauto-restera-reine-a-quebec.php

Je parlais ici il y a quelques semaines (voir: Comme s'il n'y avait pas de lendemain) des projections d'achalandage des transports en commun. On en a un autre exemple qui, celui-ci, nous touche de près, ici-même à Québec. Ci-dessous un extrait de l'article du Soleil qui nous donne les projections faites en 2003, pour 2030. À ce rythme-là, on pourrait presque s'attendre à ce que plus personne ne prendra les transports en commun quand 2030 sera vraiment arrivé! Faut dire que c'est rarement très agréable...


Plus concrètement encore, l'achalandage quotidien du Réseau de transport de la Capitale (RTC) devait être de 300 000 passagers en 2030. Les derniers calculs prévoient plutôt 182 390 passagers en autobus 10 ans plus tard.




On ne nous dit pas ici s'il s'agit de la compagnie Raleigh, mais c'est très possible.






Quelqu'un comme moi qui a roulé beaucoup sur des vélos cyclosportifs de prestige (fibre de carbone, titane, aciers Columbus ou Reynolds) pourrait être très réticent à s'équiper d'un vélo de cette catégorie dont le prix est de 1000$cad ou moins. Ce qui est couramment disponible dans le commerce s'est dégradé considérablement depuis 30 ans. Cadres en aluminium banals, roues lourdes, transmissions pleins de compromis, périphérie quelconque, mieux vaut ne pas comparer tout ça à ce que je me suis procuré durant les années '80 dans cette fourchette de prix.

La rumeur persiste à dire qu'il vaut mieux, côté transmission, ne pas descendre en bas de 105 dans la hiérarchie de Shimano. Ce qui impliquerait presqu'automatiquement que vous n'aurez pas le pire cadre de la marque de votre choix, et qu'il y aurait un minimum de qualité dans l'ensemble. Je peux comprendre le raisonnement, d'autant plus que c'est une façon commode et rapide de donner un conseil à un acheteur potentiel peu au fait de la technologie actuelle.

Malgré cela, si j'avais à m'acheter un vélo cyclosportif demain matin, je passerais outre ce conseil et je me procurerais un vélo dont le prix serait plus modeste que celui dont je dispose maintenant. Mon intérêt a baissé pour cette forme de cyclisme. Alors qu'auparavant, mon dimanche pouvait être consacré à cette activité, je trouve plus attrayant de rechercher la tranquilité des routes campagnardes en gravelle. Ce qui implique des pneus de 28 mm ou plus, que les cadres modernes de route n'acceptent pas volontiers. Pas du tout, en fait. Les Américains appellent high idling capacity cet état de fait où un objet est acheté mais sert peu, parfois même très peu. Un exemple: la moyenne de la durée d'utilisation d'une perceuse électrique, durant toute sa vie chez un consommateur (non-professionnel) est de... 13 minutes!

Mais j'aime encore faire des sorties courtes en semaine, chaque semaine, pour l'entraînement. Pas assez  pour justifier d'investir lourdement dans un cadre de un kilo équipé 105 ou Ultegra, mais assez pour faire un montage futé dont le résultat resterait quand même intéressant. Je sais comment faire, laissez-moi vous expliquer.

Je ferais particulièrement attention aux points suivants:


  1. Un cadre en alu (pour l'économie) léger. Autour de 1.4 kg, poids-cible qui permet d'éviter la raideur des cadres aux parois plus épaisses. Et leurs sensations un peu figées.
  2. Un pédalier au poids raisonnable. Sans aller chercher un poids record, mais au moins éviter les enclumes qui ornent souvent ce genre de vélo. Tout en ayant un choix de braquet qui correspond à mes besoins et ma capacité. 
  3. Des jantes dont le poids est sélectionné avec soin. À ce sujet, voir mon message du 6 mars 2015 intitulé À PROPOS DES JANTES. En résumé, j'évite de sur-construire, et je ne choisis pas pour le coup d'oeil, plutôt pour le coup de pédale et son résultat.
  4. Des pédales automatiques dont la marque est sans prestige, parce que de toute façon elles sont toutes efficaces. Il suffit d'éviter les modèles de tout premier prix (les moins chères d'entre toutes). Vous préférez ls produits de haut-de-gamme Speedplay, Look ou je ne sais trop quelle autre marque? Je sais pourquoi, mais on peut vivre sans. La preuve, avant de les avoir, on ne les avait pas. 
  5. Pour le reste, éviter les accessoires douteux ou les choix qui gâchent le reste. 

Faut avouer que quand on aime les bons vélos, l'exercice n'est pas facile. En choisissant les différents éléments, c'est souvent tentant de se dire que ça vaut bien le coût de mettre ceci ou cela. Mais si on fait ça dix fois, la facture finale n'est plus du tout la même. Dix concepteurs qui se mettent à cette tâche vont produire dix vélos différents. Je visais un maximum de 900$ et j'y suis arrivé sans avoir à changer un des choix que j'avais fait. Pour un vélo complet, ça me donne un prix de 888$cad + pédales + taxes. Bien sûr, je peux revoir le prix à la baisse, mais le poids du vélo en pâtirait, et il ne faut pas oublier la vocation sportive d'une telle machine.

Petit mot au sujet du poids: j'aime mieux ne pas spéculer sur le résultat sur la balance. Je risquerais de donner un chiffre inexact. Il faut compléter le montage pour savoir à quoi s'en tenir vraiment.

Quelques détails sur les ingrédients:


  • Cadre Falardeau Alu9 course à épaisseur (très) variable (triple butted)
  • Fourche avant en fibre de carbone
  • Guidon courbé en alu
  • Pédalier compact Shimano Tiagra
  • Shimano A070: dérailleur avant, leviers frein-vitessse
  • Dérailleur arrière Shimano Claris
  • Cassette HG20 7 vitesses
  • Pneus Schwalbe Lugano
  • Moyeux Shimano Tiagra
  • Selle Eclypse
  • Jantes avant Ritchey, arrière à déterminer selon l'acheteur
  • Autres détails sur demande

Je dois cependant mentionner que si je le faisais pour moi, il serait différent. Même cadre, mais une fourche à colonne de direction (en anglais: steerer tube) en fibre de carbone pour la légèreté. Guidon droit plutôt que courbé, leviers Shimano très différents, selon ce que j'ai sous la main. Un pédalier triple Deore (48 dents) avec une petite cassette HG50 12/21 7 vitesses. Cette dernière est plus légère qu'une Dura Ace de modèle courant et coûte presque dix fois moins cher! L'important pour moi est d'avoir des rapports serrés avec peu d'écart entre les pignons. Le troisième plateau permet de pédaler facile dans les passages difficiles ou lorsqu'on veut y aller mollo, malgré le fait que le plus gros pignon de la cassette a l'air sorti tout droit d'une étape du Tour du Plat Pays. 

Bref, un peu déstabilisant pour qui se contente de suivre les tendances du marché. Un vélo atypique qui ressemble à celui que j'ai, mais en moins cher, car le mien est bâti à partir d'un cadre en fibre de carbone monocoque, en plus d'avoir des pièces de plus haute gamme.. Je pourrais en offrir un (Alu9) pour 824$ + pédales + taxes. Je suis convaincu qu'il serait plus léger que celui de 888$, car seul le pédalier Deore risque d'être plus lourd que le pédalier Tiagra, et de peu. En tout cas, j'ai éprouvé la recette depuis plusieurs années et je ne suis jamais revenu en arrière. J'ai vu toutes sortes de réactions face à cette machine, vraiment toutes sortes et pour dire franchement, je m'en amuse.




En matière de gaspillage de ressources, c'est plutôt exemplaire, mais bon... essayez de regarder ça sans sourire:



vendredi 13 mars 2015

MONSIEUR MYSTÈRE.





Ville de Québec, 4 mars 2015.


J'avais rebaptisé Raymond: Mister Ray, en l'honneur de Sun Ra, alias Mister Mistery. Vous ne connaissez pas Sun Ra? Un illuminé de grande classe, constamment en contact avec l'Univers entier, mais pas exactement de la même façon qu'Albert Einstein...

Il s'occupait des claviers, en plus de diriger son Arkestra. C'était une grande formation, une espèce de big band sur l'acide où en plus des souffleurs habituels, on se payait le luxe d'une poignée de chanteuses/danseuses. On m'a dit qu'en Europe, Sun Ra était assez connu pour avoir déjà rempli un stade. "The Others in their World", un titre assez représentatif, je l'ai mis à la fin de ce message pour que vous ayez une idée de ce qu'il faisait. Remarquez, j'aurais pu vous proposer quelque chose de plus cosmique, mais on en aurait perdu un ou deux avant que la fusée soit rendue à destination... La prise de son date des années '50, et il s'en faisait des meilleures à l'époque, mais on peut se dire que ça ajoute un peu au mystère de la chose.



Heureusement, les trous qu'on peut voir dans la chaussée à Québec, lors du dégel, ne sont pas tous aussi monstrueux que celui-ci. Mais s'ils sont plus petits, ils ne sont pas annoncés par les cônes oranges que vous voyez sur la photo. Il faut donc se méfier partout où l'on met les roues. 




Après une journée de route vers le sud à partir de Québec, nous sommes arrivés à Lac-Etchemin. L'endroit est en partie un lieu de villégiature et l'auberge était en conséquence: monsieur Mystère a hésité un peu devant le tarif demandé pour la chambre. Mais nous l'avons accepté et une fois rendu dans la chambre, nous ne l'avons pas regretté.

En fait, on s'est regardé et nous sommes tombés d'accord qu'il n'y avait pas meilleure vie que celle-là: pédaler, manger et un repos dans le confort. Ça nous a donné le goût de gagner à la loterie!

Mister Ray a d'ailleurs déclaré pendant la fin de semaine: "Qu'est-ce qu'on faisait avant ça? On dormait!!!"

Le lendemain matin, nous nous sommes levés et sans plus attendre nous avons quitté l'auberge. En sortant de la petite ville de Lac-Etchemin, nous nous sommes aperçus qu'à la laiterie locale, on accueillait les clients avec non seulement des produits laitiers mais aussi du pain et d'autres boustifailles. Ainsi que tables et chaises pour s'empiffrer confortablement, ce que nous avons fait.

Le repas incluait une généreuse portion de lait au chocolat. Était-ce grâce à lui? Le temps était gris et frais, mais lorsque nous sommes remontés en selle, nous étions en feu. Vers l'ouest, la route était un plateau valloné, et nous avons couvert au moins 33 kilomètres pendant la première heure. Et ça en prend, de l'énergie, parce que le prochain village était Saint-Odilon-de-Cranbourne, où la raideur des côtes a sûrement tué plus d'un habitant. On y est dans le vif du sujet, en plein coeur des Appalaches. On en meurt ou on devient fort...



Vélo pliant militaire, photographié au musée dédié au Débarquement de Normandie de 1944  J'ai vaguement souvenir d'avoir entendu dire que certains parachutistes militaires, quelque part, ont déjà sauté accompagné d'un vélo pliant d'une sorte ou d'une autre. . 
Photo: courtoisie André Labrecque.



J'ai finalement décidé de ne pas attendre pour expérimenter le film vinyle connu sous le nom de wrap, dont je vous parlais dans  mon message du 20 février 2015 ("Emballant"). Sans pouvoir prétendre maîtriser le sujet complètement après trois essais, je suis quand même encouragé par les résultats. Il n'en reste pas moins que les cadres de vélos ne sont pas un support idéal pour le produit. On peut quand même compenser par un peu de créativité.

Sur une automobile, on peut contourner l'extrémité des panneaux et des portes pour couper et cacher la fin du vinyle. On n'a pas ce luxe sur un vélo. Heureusement, on peut profiter du fait que le vélo, sur ses pattes, ne montre pas le dessous de ses tubes horizontal et oblique. Ça permet de ne pas avoir à faire l'effort de faire un joint impeccable là où les deux extrémités de la feuille se rejoignent après avoir fait le tour du tube. Et même si on prend la peine de regarder dessous, ça n'est pas laid du tout, en autant que les deux couleurs en place ne jurent pas.

Ça vous tente d'essayer vous-même? Je peux vous offrir assez de surface d'une couleur pour faire un ou deux vélos pour la modique somme de dix dollars. J'ai déjà en stock du rouge mat, du blanc nacré, du blanc à fini fibre de carbone, du noir lustré et du noir mat. Sans compter un très beau bleu comme celui que vous pouvez voir sur la photo ci-dessous. Et j'ai l'intention, si la demande le justifie, de stocker un plus vaste choix de couleurs et de finis. De plus, je peux vous offrir de faire le travail pour vous. Dépendant de ce qui est fait je pourrais, pour un tarif autour de 48$, faire le triangle principal d'un vélo. Tarif établi sur la base d'un cadre où il n'y a pas ou peu d'accessoires à retirer du cadre pour procéder.

L'idéal serait de travailler sur un cadre neuf, ou à tout le moins complètement dépouillé de toutes ses pièces. Mais on peut quand même aller de l'avant sur un vélo complet, moyennant certaines contraintes, notamment au niveau des décalques d'identification de marque du vélo. Le produit ne fait pas disparaître les imperfections de la surface couverte et l'idéal serait de la préparer en conséquence. Aussi, les tubes hydroformés comme le tube oblique sur le vélo ci-dessous sont un défi lors de la pose.

J'ai retiré une de ces pellicules qui était en place depuis une semaine, pour fin de test. Le produit possède un niveau d'adhésion qui est un excellent compromis entre le besoin d'adhésion et la capacité à l'enlever si vous le désirez. Je ne sais pas si ça change à long terme, mais ça laisse entrevoir une bonne facilité à faire des changements si un jour vous le souhaitez.

Je suis dans une courbe d'apprentissage encourageante en ce moment. Mon dernier essai est illustré sur les photos ci-dessous qui vous montre mon vélo d'hiver personnel avant (tout noir) et après (noir et bleu). J'ai l'intention de continuer en espérant faire un travail meilleur à chaque fois.
















vendredi 6 mars 2015

À PROPOS DES JANTES.






Mercredi dernier, par une journée ensoleillée où la neige tombée pendant la nuit était abondante et légère, je roulais sur les Plaines d'Abraham, un grand parc situé près du Vieux-Québec et où les touristes aiment aller profiter de la vie.

Il n'y avait aucune circulation automobile en cette matinée. Et voilà ce Français (je suppose), piqué debout au milieu d'une intersection, le nez dans ce qui m'a semblé être un guide de voyage.

En passant à sa hauteur, je lui demande avec mon accent d'Amérique: "Qu'est-ce tu cherches?" (sic)

En souriant, il me répond: "Comme ça, je lis."

Je le quitte en lui disant: "Belle place pour lire!" C'est vrai, l'endroit est magnifique. D'ailleurs moi aussi je lisais. Le terrain. Là où il n'y avait pas de traces de pas ou de voiture, mon vélo avançait en douceur, malgré les vingt centimètres de neige au sol. Chouettes, les pneus de cyclocross.




Vus des Plaines, l'Assemblée Nationale et l'hôtel Hilton de Québec.


La semaine dernière, j'ai dépoussiéré quelques numéros d'un magazine depuis longtemps disparu: BIKE TECH. Sous-titré Bicycling Magazine's Newsletter for the Technical Enthusiast.

Je me suis arrêté particulièrement au numéro d'avril 1984, à cause d'un article intitulé: The Aluminum Rim: Design and Function écrit par un ingénieur-concepteur de jantes chez Mistral Rims, une division de TI Sturmey Archer Ltd., Chris Juden.

L'article m'intéresse d'autant plus qu'il nous fournit des chiffres au sujet de la solidité (strength, la force), la rigidité (à ne pas confondre), en plus du poids de quelques modèles de jantes de l'époque. On pourra regretter qu'il ne s'agisse pas de jantes couramment disponibles. Mais les chiffres sont éloquents et je n'ai aucune raison de croire que l'aluminium utilisé maintenant soit tellement différent de ce qui était disponible à l'époque. Corrigez-moi si je me trompe. Bien sûr, à l'occasion, une marque ou l'autre a vanté les mérites de sa nouvelle recette métallurgique, mais ces recettes ont tendance à disparaître après quelques années au profit d'une nouvelle merveille technologique ou même au profit de... rien du tout. On range tambours et trompettes.

En fait, les innovations concernant les jantes, depuis la publication de l'article, sont surtout ce qui suit:


  • Les jantes profilées se sont répandues.
  • L'apparition des jantes en fibre de carbone (haut-de-gamme seulement)
  • Le machinage de la piste de freinage, ainsi que le sillon indicateur d'usure de flanc.
  • Les jantes spécifiquement construites pour les freins à disque, c'est-à-dire sans piste de freinage.




Ça, c'était avant la dernière neige.


Dans le tableau ci-dessous, on peut remarquer que, comme par hasard, la jante la plus lourde, la Mistral 120 est la plus rigide et la plus solide. À l'opposé, on constate que, à une exception près, la jante la plus légère, la Mavic G40, est aussi la moins rigide et la moins solide. Cliquez sur l'image pour en lire les détails plus facilement.





L'exception, c'est la Weinmann 256 qui, malgré son poids, n'est ni rigide ni solide. Regardez sa coupe: il s'agit d'une jante à simple paroi qui n'a pas de "boîtes" sur les côtés, donc probablement moins chère à produire pour ces raisons.

Ailleurs dans l'article, on peut confirmer cette tendance sur des graphiques qui montrent qu'on peut presque tracer une diagonale parfaite dans le compromis entre la robustesse et la légèreté.

Tout cela me conforte, si besoin était, dans mon approche du choix des jantes que j'utilise personnellement et que je propose à mes différents clients.

A) La jante avant est moins sollicitée que la jante arrière, à cause de la répartition du poids des cyclistes sur leurs vélos, et à cause de l'absence de motricité à l'avant.

B) La jante arrière est légèrement défavorisée par l'effet parapluie rendu nécessaire par la présence de la roue libre/cassette du côté droit de la roue arrière. La conséquence, c'est qu'il y a toujours, à divers degrés, une différence de tension entre les rayons arrière gauches et ceux du côté droit. Malgré le fait qu'on utilise habituellement une longueur de rayons différente des deux côtés.

C) Certains cyclistes ont un historique de roues fausses ou abîmées pour différentes raisons. Ce n'est heureusement pas le cas de tout le monde, et c'est pourquoi j'aime en tenir compte lorsqu'un ou une client/e envisage l'achat d'une roue ou d'un vélo.

D) Les jantes plates ou concaves qu'on voit sur ce tableau ont tendance à être plus légères que les jantes profilées qui sont maintenant devenues familières. Plus le profil est marqué, plus la jante sera lourde et rigide. Certaines caractéristiques peuvent influencer le résultat final, mais, en gros, la règle s'applique et vous pouvez considérer que les jantes à profil élevé seront plus indiquées pour des parcours plats à vitesses élevées que pour des parcours côteux où un poids élevé peut devenir un handicap flagrant.

E) La rigidité n'est pas un avantage pour tous. Une personne légère et/ou peu puissante percevra comme désagréable et tape-cul ce qu'une personne à fort gabarit ressentira comme un avantage. Pour cette raison, un vendeur de vélo athlétique et de bonne foi pourrait donner de mauvais conseils à un utilisateur occasionnel peu entraîné.



Les Plaines sont maintenant débarrassées des Carnavaleux. On peut en jouir librement.



Sur la base de tout cela, quelques chiffres. Les miens d'abord. Je suis un cycliste de taille moyenne et mes qualités athlétiques (qui n'ont jamais été extraordinaires) sont en perte de vitesse. Je n'ai pas d'historique de roues abîmées pour cause de maltraitance inutile et je suis abonné aux parcours côteux. Sur mon vélo de route (700 x 23), une jante de 406 grammes à l'avant, avec 24 rayons croisés de un. À l'arrière, une jante autour de 470 grammes avec 36 rayons croisés de 3. Sur mon vélo polyvalent (asphalte/gravelle, utilitaire/récréatif, 700 x 28), une jante de 406 grammes à l'avant, avec 32 rayons croisés de trois. À l'arrière, une jante de 625 grammes avec 36 rayons croisés de trois. Et sur mon vélo d'hiver, deux roues économiques à 36 rayons, qui seront remplacées à faible coût lorsqu'elles laissent trop à désirer sur un point ou un autre. De toute façon elles subissent un vieillissement accéléré.

Pour ce qui est de mes clients, mes recommandations varieront sur la base de tout ce que vous pouvez lire ci-dessus. Gabarit du cycliste, style de conduite, terrain fréquenté, compatibilité avec la largeur de pneus désirée. Évidemment, la marque/modèle de jante n'est pas le seul critère: le nombre et la qualité des rayons ont leur importance aussi.

Vous remarquerez que, dans le cas des roues de route (700 x 23) de haut-de-gamme, assemblées par les compagnies qui les offrent (Mavic, Zipp ou autres Easton), les dites compagnies s'abstiennent soigneusement de nous dire combien pèsent les jantes. Comme si ça n'avait pas d'importance! Elles ne donnent que le poids des roues complètes. Et comme par hasard Shimano, dans son catalogue 2014, nous donne le poids des jantes de la roue WH-9000-C24-CL: 384 grammes. J'espère qu'elles sont bonnes, ces jantes, car elles ne sont supportées que par 16 rayons à l'avant, et 20 à l'arrière... Sinon, pour les autres roues du catalogue, aucune mention, seulement des poids de roues complètes. Attendez, non! La roue à boyau WH-9000-C24-TU en est à une jante de 265 grammes!!! Avantage injuste: les jantes à boyau sont plus légères. Et permettez-moi d'ouvrir ici une parenthèse au sujet de ce type de roues modernes qui ont nettement moins de rayons qu'il n'y a de dents dans votre bouche (j'espère pour vous!): conservez votre facture. Il y a eu des campagnes de rappel ces dernières années et ce, chez plus d'un manufacturier. Et même, dans certains cas, il n'y a pas eu de telle campagne même si le produit vieillissait un peu trop vite.

À propos du poids des jantes, un petit détail: on m'a dit, il y a quelques années, que Mavic ne comptabilisait pas le poids des oeillets dans le poids total de la jante. Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas s'ils le font encore, et je ne sais pas s'ils sont les seuls à faire ça. En tout cas, le poids annoncé pour leur A319 était de 595 grammes, alors que ma balance numérique indique 625 grammes. Il s'agit d'une jante à double oeillet.




Mon but, dans tout ça, est de ne pas avoir de poids inutile. On en ajoute, puis arrive un point où il y en a plus que ce que le client considère fournir une robustesse suffisante. Il traîne alors une charge qui donne le même résultat qu'une baisse de sa force. Ces dernières années, on a vu une prolifération de jantes profilées, sur des vélos qui n'en ont absolument pas besoin. Et pourquoi donc? Pas de mystère là-dedans: ça en met plein la vue, coup d'oeil moderne et tant pis si la victime de cette arnaque traîne deux jantes raides et lourdes. Consolation: elles seront assez robustes pour asseoir Honey Boo-Boo sur le porte-bagage!





Petite surprise à la lecture de l'article: les jantes simple paroi ne méritent pas leur réputation de fragilité. En regardant les trois tableaux, on voit bien que la seule jante simple paroi qui ne fait pas bonne figure, c'est la Weinmann 256 qui n'est pas équipée de boîtes latérales. Sinon les autres simple paroi, comme la Mistral 120 ou la Rigida 1622, sont en tête de peloton pour ce qui est de la rigidité ou de la résistance radiale (radial strength).

De plus, la pression exercée par la chambre à air gonflée vient stabiliser les écrous de rayons qui ont moins tendance à se desserrer pour cette raison. Celui qui a attiré mon attention sur ce phénomène vendait des milliers de roues à chaque année.

Et en plus de leur légèreté, les jantes de route/course sont désavantagées par leur étroitesse. En devenant plus larges, les jantes deviennent forcément plus rigide latéralement, à qualité égale. Mais notez qu'on ne voit jamais de jante route/course simple paroi. Les seules que je me rappelle avoir vues, ce sont les Weinmann concaves qui étaient proposées, durant les années '80, en version étroite pour pneus de 23 mm.









Finalement, dans beaucoup de cas, il me semble inapproprié d'avoir deux jantes identiques sur le même vélo. Je préfère avoir une jante légère en avant, où on a moins besoin de robustesse. Par contre il y a des cas où je préfère deux jantes identiques:

  • Un vélo de cyclotourisme, avec une jante lourde et robuste en avant comme en arrière. Ça sert de garantie contre les ennuis en voyage, d'autant plus que le vélo sera probablement chargé.
  • Un vélo d'hiver, avec deux jantes économiques et où le souci d'efficacité se déplace sur d'autres aspects du vélo.
  • Un vélo de course équipé d'une paire de roues à jantes légères qui ne servent que le jour de la course. On peut mettre des roues moins délicates pour l'entraînement, ou utiliser un autre vélo tout simplement.
  • Un vélo de descente tout-terrain, ou aussi un vélo tout-terrain très sollicité où deux jantes robustes vous éviteront de rentrer à pied...
Le mot de la fin: méfiez-vous d'un cycliste qui condamnerait une marque/modèle de jante sur la base d'une anecdote personnelle. Le stress cumulatif ou accidentel qu'une jante a subi aurait peut-être réussi à venir à bout de bien d'autres modèles. Et gardez à l'esprit que les jantes n'apprécient pas le stress latéral.

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Un peu... déjantée, la guitariste-chanteuse-auteure-compositrice-interprète Saint-Vincent: