vendredi 25 novembre 2016

NEUF PERSONNES, DIX RÉPONSES.






Imaginez un instant que vous vous donneriez la mission de concevoir un vélo hybride, ou, comme on dit en Europe, un vélo tous-chemins. Quelle serait votre priorité?

Trois possibilités:
  1. Vous le concevez pour vous-même.
  2. Vous le concevez pour la revente au public.
  3. Vous le concevez pour vous-même et pour la revente.
Ça fait plusieurs années que je me livre à cet exercice, et je tombe dans la troisième catégorie. Je suis un utilisateur assidu, et auprès de ma clientèle, ce style de vélo est le plus populaire depuis des années. 

On peut interpréter le genre de plus d'une façon, et l'industrie du vélo, au début, s'est contentée de faire des vélos destinés à une clientèle peu sportive, un peu l'équivalent d'une chaise de patio avec des roues et une paire de pédales. Embarque, on n'ira pas vite! En fait, je n'aime pas tellement l'expression "vélo hybride", à cause de la connotation péjorative qui s'est développée autour d'elle. Je lui préférerais plutôt "vélo polyvalent". Ce serait une bonne description de ce que j'en fais personnellement.



Et si on veut s'éloigner un peu de son patio, et qu'en plus on trouve des côtes sur son chemin, même, beaucoup de côtes, mieux vaut dégraisser l'animal. J'évite de sur-construire, overbuilding comme on dit en anglais, et pour tout dire je n'hésite pas à m'inspirer du vélo route/course sur certains aspects de la machine.

Le résultat n'est pas triste. Plus polyvalent que le vélo de route pur et dur, moins lourd (à prix égal) que les vélos dont les pneus ont deux pouces (ou plus) de large, mettez-vous le couteau entre les dents et vous pourriez surprendre ceux qui s'imaginent que seul un pneu de 23 mm est rapide. Le voici dans la nature:



Mais à quel point? On peut spéculer longtemps là-dessus. Quel pourcentage de vélocité sera sacrifié pour avoir accès à cette polyvalence? Posez la question à 9 personnes, et vous pourriez avoir 10 réponses. 

J'ai décidé d'en avoir le coeur net, dans la mesure où une telle chose est possible. Dans la foulée des tests antérieurs que j'ai faits sur deux vélos équipés de pneus de 700 x 23, j'ai fait la même chose sur mon vélo hybride Falardeau Alu9. Voici une description du protocole tel que je l'ai publié ici-même le 11 novembre dernier. 


 Le vélo fait le même parcours quatre fois, lors de quatre journées différentes, puis je fais une moyenne. Je ne prends jamais le sillage d'un autre cycliste pour augmenter ma vitesse. Sinon, c'est un rhytme de contre-la-montre, pas de sprints. Le parcours est faisable (par moi...) sous les 40 minutes.

Le parcours se prête bien à ce genre de test. Deux côtes à monter, une à descendre. Le gain d'altitude total est autour de 216 mètres sur une distance totale de 14 kilomètres. Car c'est dans les montées que le vélo le plus léger peut tirer parti de son avantage. Sur un parcours complètement plat, la différence serait moins considérable. 



Le vélo de route le plus rapide avait une moyenne de 22.8 km/h. L'autre, deux fois moins cher, produisait 22.6 km/h. Et l'hybride, avec ses pneus de 28 mm, a atteint une moyenne de 22.3 km/h. En fait, 22.37 pour être plus exact.

Évidemment, ce vélo polyvalent tombe dans une catégorie relativement récente qui a reçu l'appellation "hybride-performance". Pas exactement un produit grand-public, du moins pas du genre qu'on offre à n'importe qui sans leur demander ce qu'ils ont l'intention de faire avec. Il me donne une position agressive, guidon plus bas que la selle, il est équipé d'une jante avant de 400 grammes, un jeu de tubes de cadre allégé et des pneus choisis pour leur légèreté. J'en fabrique des plus costauds, ou moins ambitieux, selon ce que les clients préfèrent, et ce qu'ils ont l'intention de payer. Le mien vaudrait à peu près 1300$ plus taxes s'il était neuf, et tel que lors de ces tests, il est très adéquat sur la gravelle appalachienne. Il pèse 10.68 kgs (23.49 lbs) incluant la majeure partie de ses accessoires (pompe, porte-bouteille, etc.).



Je parlais de ces performances avec un client, récemment, et il me faisait remarquer que ces moyennes ne sont pas très élevées. Normal, avec son vélo de route, il produit probablement des moyennes affichées au compteur qui se situent plus près de 30 km/h, sur un parcours où les pentes sont moins nombreuses et moins raides. Mais il ne faut pas oublier que la moyenne chute de façon marquée à chacune des deux montées, et qu'il y a une seule descente importante pour compenser. Sur le plat, ce vélo hybride est capable lui aussi de faire des segments à une vitesse moyenne autour de 30 km/h. Voyez vous-même:


Et comme vous pouvez le voir, dans les descentes, il se défend bien là aussi. C'est vraiment dans les montées qu'on peut sentir que la performance faiblit par rapport au vélo de route/course. Surtout avec moi dont les qualités de grimpeur ont fondu avec les années. Un de mes amis s'est procuré un de ces Alu9 hybride, et prend un malin plaisir à montrer sa roue arrière à des gens équipés route/carbone/Ultegra etcetera. Pas surprenant, il est plus fort que moi et à la lumière des chiffres que je viens de produire, normal qu'une bonne paire de jambes soit plus importante que l'écart de 1% ou 2% de vitesse que j'ai obtenu selon le vélo utilisé.



La semaine dernière, je vous parlais des réparations de cadres de vélos en vous donnant un exemple d'un cadre en acier dont le tube de selle avait été remplacé en partie. Nous avons complété cette semaine la réparation d'un cadre en fibre de carbone qui, après 30,000 kilomètres, avait besoin d'une réparation au niveau de la partie supérieure du tube de selle, sous le collet de serrage de la tige de selle.



Il s'agit d'un cadre en fibre 12 k, un gros tressage différent de la fibre 3 k qui a été utilisée pour la réparation.
Celui qui ne le sait pas ne se doutera pas qu'il y a eu réparation à cet endroit à moins d'être un connaisseur et de remarquer la différence de la taille du tressage. Il n'y a pas moins de matière qu'avant, et cette zone de convergence de plusieurs tubes a un bel avenir devant elle. Youri en a profité pour améliorer l'intérieur du tube de selle.

Coût total de la facture: 100$cad. Moins cher qu'un cadre neuf...



J'aime bien monter des côtes en vélo. Mais je n'ai jamais fait le Défi des Cent Cols, et je ne le ferai probablement jamais. Disons que c'est parce que c'est un peu loin de chez nous...

https://www.theguardian.com/environment/bike-blog/2016/nov/18/conquering-the-cent-cols-challenge-in-the-pyrenees-from-despair-to-defiance

Je vous ai parlé cet automne du GPS pour vélo que j'utilise couramment, et dont je suis très satisfait, le Lezyne Power GPS. Mais il y a aussi le Lezyne Mini GPS, et il est en spécial en ce moment. Détail suggéré: 150$, il est réduit à 100$ (+ taxes). C'est le plus léger de la gamme 2016.


Vous pourrez, avec ce modèle, faire ce que je fais avec le mien, par exemple archiver des sorties comme celle dont je vous montre les photos aujourd'hui:



Depuis déjà quelques années, il y a une nouvelle génération de pianistes extraordinaires qui émerge. Ils sont lyriques, lumineux, et très bien entourés.



vendredi 18 novembre 2016

UN SIÈGE DANS LA PREMIÈRE RANGÉE.






S'il vous arrivait d'abîmer le cadre de votre vélo, suffisamment pour sentir le besoin d'une intervention thérapeutique, il y a de bonnes chances que le détaillant auquel vous vous adressez va vous suggérer de remplacer le cadre. Ce qui vous occasionnera des frais d'au moins 600$ cad, habituellement. Et la facture pourrait s'alourdir beaucoup si vous voulez un cadre de haut-de-gamme.

Nous avons réparé plusieurs cadres cette année. Soit de l'acier, comme dans les photos ci-dessous, soit en fibre de carbone. Toutes les réparations entreprises se sont bien passées, les vélos sont de retour sur la route et la facture allait de 60$ à 250$. La réparation la plus dispendieuse était due au fait qu'il y avait deux bris sur le même cadre, un vélo de route en fibre de carbone.

Sur le Surly qu'on voit ici, une vilaine agression a obligé l'amputation du segment supérieur du tube de selle comme on le voit dans la première photo. Cliquez sur l'image pour la voir mieux.


Puis, un cadre en fin de carrière a fourni une partie de son tube de selle pour remplacer la partie amputée. Les dimensions extérieure et intérieure du tube étant supérieures à celles du cadre abîmé, le nouveau tube avale les extrémités de la partie amputée et fait une sorte de renforcement externe dont la robustesse sera encore meilleure que lorsque le cadre était neuf.




Les trois points que l'on voit ci-dessous, sous la jonction des deux tubes, constitue la signature de l'artisan-soudeur. 
Le résultat de cette intervention s'apparente à ce qu'on appelle en anglais external butt, une double épaisseur de métal, bien visible de l'extérieur, sur un courte distance, qui survivra probablement au reste du cadre.



Il ne reste plus qu'à peinturer le métal exposé pour éviter la rouille, d'autant plus que ce cadre roulera en hiver à Québec, un défi majeur pour tous les cadres en acier. 

Photos du cadre courtoisie de Youri Harvey.



Sur la Route de Saint-Pierre, au sud de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-sud près de Montmagny.


Je vous lance une invitation. Samedi le 19 novembre (demain, donc) nous irons à Saint-Édouard-de-Lotbinière pour faire une sortie de vélo-gravelle. Bienvenue à tous. Le rendez-vous exact est à l'église du village, à 11:00 h. Apportez-vous un sandwich et de quoi vous dépanner (chambre à air, etc.), car la sortie va durer autour de trois ou quatre heures. C'est un secteur plat, contrairement à notre habitude, donc plus facile.

La température annoncée indique que ce sera probablement la journée moins froide avant longtemps. J'en profite pour faire une invitation spéciale à tous mes lecteurs de la grande région de Montréal. Saint-Édouard est à l'ouest de Québec, ce qui veut dire que la distance à faire pour se rendre de chez vous est un peu moins grande que si je vous invitais au coeur de la Beauce, par exemple.

N'ayez crainte, nous n'allons pas particulièrement vite, le but est surtout de prendre l'air dans un endroit agréable, en évitant la circulation automobile le plus possible. Nous prévoyons rouler au sud de Saint-Édouard, dans des chemins peu fréquentés. Les pneus de 23 mm de largeur ne conviennent pas à ce genre de parcours. L'idéal, c'est 28 ou plus. Autrement dit, toutes sortes de vélos peuvent être à l'aise là-bas, sauf les extrêmes.


Au fond, Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud.

Je suis en train de procéder à une commande de cadres en aluminium pour 2017. On me recommande l'aluminium 6061 plutôt que le 7005 auquel je suis habitué. J'apprends qu'il y a eu un glissement de l'industrie du vélo vers les séries 6061 ces dernières années, incluant les deux poids lourds de l'industrie mondiale: Giant et Merida. En plus de leur propre marque, le premier fait des Trek et des Colnago, entre autres, et le second fait des Specialized, entre autres.

Un extrait d'un courriel que j'ai reçu de Taiwan cette semaine:

7005 material have min quantity limit ,like heat treatment process takes long time waiting and cost is higher.
Before ,we like to use 7005 but these years more factory use 6061 .
Now ,like Giant or Merida also build a lot of  frame by 6061.

Si le sujet vous intéresse, vous trouverez probablement instructif ce qu'on peut lire ici:

http://bike-advisor.com/bicycle-guides/aluminum-frames-6061-vs-7005-which-is-the-best.html

Parlant de Giant, leurs ventes ont baissé depuis un an. Le marché américain est en recul, et les gains faits au Japon ne sont pas suffisants pour compenser. L'Europe elle, est friande de vélos électriques par les temps qui courent, et la situation économique générale en Chine est à la baisse, ce qui influence forcément le marché du vélo.

Pendant ce temps, l'usine que SRAM avait démarré en Chine en 2013 vient de fermer. Elle fonctionnait à capacité réduite à cause du marché mondial stagnant et c'était la seule usine de SRAM en Chine. Tout a été transféré à Taiwan.




Quand mon ami m'a dit, la veille des élections américaines du 8 novembre, qu'il s'attendait à une victoire de Hillary Clinton, je lui ai exprimé des réserves sur cette prédiction. J'avais fraîchement à la mémoire les commentaires de Michael Moore sur le sujet, à propos du mécontentement de tout un pan de la société américaine sur l'évolution de l'économie, entre autres choses.

Malgré toutes les réserves qu'on peut avoir au sujet de Michael Moore, il a mis en plein dans le mille. Faut dire que le Collège Électoral l'a aidé un peu, puisqu'en réalité, Clinton a reçu plus de votes en sa faveur que le Donald. Mais après ces élections, Mister Moore a affirmé que Trump ne terminerait pas son premier mandat.

Voilà une affirmation plutôt audacieuse, puisque si on regarde en arrière dans l'histoire des États-Unis, peu de présidents sont partis avant la fin, si on fait exception de Richard Nixon et aussi ceux qui sont partis les pieds devant. Mais c'est sans tenir compte de la feuille de route du personnage, qui a donné sa démission plus souvent qu'à son tour.

Démission de quoi? Le fait d'avoir fait faillite six fois est un bon commencement, à mon avis.

http://www.politifact.com/truth-o-meter/statements/2016/jun/21/hillary-clinton/yep-donald-trumps-companies-have-declared-bankrupt/

Car il me semble qu'il y a une différence entre une, ou même deux, faillites personnelles, et une liste de six faillites qui s'apparentent à des "décisions d'affaires", rien de plus, rien de moins.

Puis il y a cette histoire du terrain de golf en Écosse qui a fini en queue de poisson, après avoir fait bien du dégât. Vraiment, il y a des voisins dont on ne veut pas.



Ensuite il y a ce méchant gag de Bill Maher qui disait que lorsqu'il a fait venir sa digne épouse de Slovénie, il a conservé la boîte pour la retourner lorsqu'elle passerait le cap des cinquante ans. Mais bon, Bill a tourné les coins ronds un peu, Melania n'est pas une web-wife sortie d'un ordinateur.

Et qu'est-ce que Trump a à voir avec le vélo, vous me direz? À part le fait qu'il n'en fait probablement jamais et que ça pourrait contribuer à le tuer? Si vous êtes jeune, vous n'avez probablement jamais entendu parler du Tour de Trump.



Je n'ai pas inventé ça. Le Tour de Trump a vraiment existé. Mais comme bien des choses dans la vie du Donald, pas très longtemps. Deux ans pour être exact: 1989 et 1990. La société Du Pont a pris le relais de cette course par étapes que Trump avait commandité avant elle et qui était une aubaine pour la visibilité qu'il allait ainsi chercher dans les médias, pour un montant relativement raisonnable. Par contre, sur le bord de la route, il n'y avait pas tant de spectateurs, puisque même Greg Lemond n'était pas si connu aux USA, malgré qu'il avait déjà gagné le Tour de France et qu'il était américain. Sa participation au Tour de Trump n'a pas suffi à transformer le public local en tifosis exhubérants.

C'est dans cette course que le jeune Viatcheslav Ekimov avait commencé à montrer les dents et se faire un nom. Il était encore amateur, et ça n'avait pas plu aux professionnels qui voulaient garder les victoires pour eux-mêmes. On a ses p'tites habitudes...



Je crois que c'est aussi durant cette course que le peloton, comme c'est parfois le cas dans les épreuves par étape, avait décidé que le tempo serait retenu dans la première partie de la journée. On se garde du jus, on s'épargne, parce que la veille a été exigeante et qu'il sera toujours temps d'en découdre. Sauf qu'un jour, un jeune coureur manquant d'expérience avait décidé d'accélérer en ce début de journée. Il y a toutes sortes de façons de dire à quelqu'un de se calmer. Sean Kelly, un costaud, est allé le rattraper et lui a versé un bidon de Gatorade sur la tête pour être certain que le message serait compris...

Et le Donald s'est lassé de commanditer, il a tourné la page sans état d'âme (je suppose) après l'édition de 1990. Je vous laisse le soin de spéculer sur les raisons qui pourraient mettre fin au règne de ce Benito des temps modernes, en dehors d'une défaite électorale en 2020. Il sera intéressant de voir, en tout cas, qui donnera à son nouveau-né le doux prénom de Donald, inspiré par cette élection, alors que depuis quelques années Adolf et Benito n'ont pas tellement la cote chez les nouveaux parents. Je parierais que ce sont plutôt des Républicains convaincus qui pencheront vers ce choix...



Et pour 2020, Michael Moore y va d'une suggestion: pourquoi le Parti Démocrate ne présenterait pas un/e candidat/e aimé du public? Il suggère Tom Hanks, ou Oprah Winfrey. C'est sûr que vu comme ça, si le but est de se faire élire, ça ne nuirait pas. Et pour ce qui est de la gouvernance, Oprah ou Tom feraient-ils pire que le Donald?

https://www.theguardian.com/film/2016/nov/14/michael-moore-oprah-winfrey-tom-hanks-us-president-donald-trump-democratic-party

George Carlin n'avait pas peur de le dire: "La vie est un freak show, et si vous êtes Américain, vous avez un siège dans la première rangée!"


L'Observatoire des Étoiles.


Sacré Roger! Toujours prêt à instruire notre belle jeunesse. Et avec le sourire en plus!




Jamie Cullum "Wind Cries Mary"

vendredi 11 novembre 2016

COMPARONS.




J'ai recommencé à aller chercher mes commandes chez Lambert, comme je l'ai déjà fait à ce temps-ci de l'année, dans le passé. 


Le 14 octobre dernier, je vous parlais d'une série de six tests que je prévoyais compléter, dans le but de voir la différence de performance entre deux vélos de route différents. En gros: même parcours, même cycliste, deux vélos différents.

Voici les deux vélos tels que je les décrivais le mois dernier:

Prenons deux vélos de route/course, avec des pneus identiques à tous points de vue, 700 x 23, la taille classique. Un pèse autour de un kilo de plus, pour les raisons suivantes, principalement:
  1. Cadre alu plutôt que fibre de carbone, à peu près 400 grammes d'écart sur ce point.
  2. Roue avant 32 rayons croisés de 3 versus 24 rayons croisés de 1.
  3. Colonne de direction de fourche en alu versus en fibre de carbone.
Le reste est par ailleurs assez proche, en tout cas sans impact important. Voici le vélo à cadre fibre de carbone, à l'avant-plan:



 Et voici le protocole que j'ai concocté:

 Chacun des deux vélos fera le parcours trois fois, puis je fais une moyenne pour les deux. Je ne prends pas le sillage d'un autre cycliste pour augmenter ma vitesse. Sinon, c'est un rhytme de contre-la-montre, pas de sprints. Le parcours est faisable (par moi...) sous les 40 minutes.

Le parcours se prête bien à ce genre de test. Deux côtes à monter, une à descendre. Le gain d'altitude total est autour de 216 mètres. Car c'est dans les montées que le vélo le plus léger peut tirer parti de son avantage. Sur un parcours complètement plat, la différence serait moins considérable. Remarquez, même si les deux vélos produisaient le même temps, le cadre en fibre de carbone, le mien en tout cas, donne des sensations plus agréables encore que l'aluminium. Ceux qui roulent beaucoup apprécieront cet aspect.


Finalement, je me suis pris au jeu et j'ai ajouté un quatrième essai à chacun des deux vélos, en me disant que plus il y aurait d'essais, plus je diminuerais l'impact d'un vent inhabituel qui est un facteur important dans le résultat de ce genre de contre-la-montre.

J'ai d'ailleurs continué ces tests avec deux autres vélos, un hybride et un vélo équipé de pneus 26 x 1.5. Pas un hybride de style vélo-confort, mais plutôt un vélo polyvalent dont la conception est influencée par le vélo de course. Je vous reparlerai de ces deux vélos.

Voici le vélo de route à cadre en aluminium:



Ne vous inquiétez pas en voyant les guidons de ces deux vélos. Grâce au choix de potences, ils sont placés plus bas que la selle, ce qui donne une position sportive à souhait. Ainsi positionné, le cycliste a une surface frontale plus discrète que celle de bien des utilisateurs de guidons courbés. Et les cornes ajoutées en bout de guidon reproduisent la position sur les cocottes préférées par la majorité des utilisateurs de guidon courbés. Comme d'habitude, vous pouvez cliquer sur les photos pour en voir les détails.



Sur la route de Saint-Pierre, au sud-ouest de Montmagny.

LES RÉSULTATS.

Les chiffres détaillés qui sont sortis de ces tests sont visibles sur strava.com et ont été compilés à partir de mon Power GPS de marque Lezyne. J'ai finalement fait deux fois quatre tests, plutôt que deux fois trois comme prévu. Cela dans le but de diminuer les chances que des conditions de vent influencent trop le résultat. 


Notez qu'il ne s'agit pas d'un parcours plat. Les côtes ont été choisies pour éviter qu'un vélo moins léger soit trop avantagé, tout en gardant une place importante pour les segments plats, bien exposés au vent. Le gain d'altitude sur ce parcours de 14 kms est d'à peu près 200 mètres. Notez que, selon la modeste expérience que j'ai avec les systèmes GPS de vélo, vous obtiendrez une plus grande précision dans vos données avec un odomètre de vélo classique. Personnellement, la précision des GPS Lezyne ou Garmin me suffit, mais certains facteurs interfèrent légèrement.

Donc, le vélo le plus léger, le vélo noir dont le cadre est en fibre de carbone et dont la valeur est d'à peu près le double de celle du vélo bleu, a fait une moyenne de 22.63 km/h. Le bleu, au cadre en aluminium, a fait une moyenne de 22.02 km/h.

Surpris? Pas moi. Ces chiffres illustrent bien le fait qu'il ne faut pas trop compter sur le vélo pour faire une performance, en autant que ce vélo ne soit pas une bourrique.


Non, ce n'est pas l'acné ou la vérole. Et ceux que vous voyez sur la photo ne portaient pas d'armes.



Les facteurs qui influencent le résultat:
  • D'abord et avant tout, le vent. Et surtout son absence, le cas échéant. Sur les segments plats, le vent de face me ralentit plus que le vent de dos ne m'aide. Résultat, la moyenne baisse. J'ai pris l'habitude, dans mes commentaires sur strava.com, d'indiquer la force du vent lors de chacune de ces sorties intitulées "le fleuve et ses côtes". Je prends cette donnée sur meteomedia.com.
  • La forme physique? Bien sûr! La mienne est plutôt stable, mais de subtiles variations sont inévitables. Si c'était à refaire, j'alternerais entre les deux vélos à tour de rôle pour augmenter la fiabilité des données. En ce moment, ma forme est bonne parce que la pression au travail a diminué. Mais pas assez, d'après moi, pour faire une différence marquée avec le mois de septembre. 
  • Je pourrais vouloir faire gagner un vélo plutôt qu'un autre, et ça pourrait influencer mon coup de pédale. En théorie, oui. En pratique, quand je suis dans le feu de l'action, j'ai tendance à y aller gaiement, et au meilleur de ma connaissance, je ne pense pas que ça ait joué de manière significative. De toutes façons, je les aime tous les deux, ces vélos.
  • La glycémie est un facteur important dans la performance de n'importe quel cycliste. J'ai fait attention à ce détail qui n'en est pas un, avant chaque départ.
En tout cas, j'ai l'intention de continuer avec au moins un de ces deux vélos, à long terme, sur le même parcours. Ce qui me donnera plus de chiffres et confirmera ou non mes impressions actuelles. De plus, j'ai déjà commencé à faire le même exercice avec deux autres vélos de types différents, dans le but de voir à quel point le pneu de 700 x 23 (et les vélos qui les utilisent) est supérieur à d'autres pneus plus polyvalents.





À la lumière de ces résultats, mes conclusions.

En fait, ce test compare une pomme et une orange. Car un vélo vaut à peu près 1000$cad, et l'autre le double. C'est forcément injuste, mais en même temps très intéressant, car les pelotons de cyclosportifs réunissent des vélos de valeur très variables. Par contre, permettez-moi de dire que le vélo de 1000$ typique, tel qu'on le trouve en général chez les détaillants canadiens, est une machine un peu boboche, à cause de roues lourdes, de cadres pas optimisés construits avec des jeux de tubes banals. Le reste de la périphérie risque fort de ne pas être beaucoup plus enthousiasmant. Et si les gens qui connaissent les vélos de route n'achètent habituellement pas ce genre de machine, ce n'est pas uniquement par snobisme.

Mais ça me donne le goût de faire un test différent. Comparer deux vélos de route, dont l'un serait bâti avec un cadre en fibre de carbone, et l'autre avec un cadre en aluminium (un bon cadre vivant, autour de 1.4 kg, pas un alu lourdaud autour de 1.9 kg). Deux vélos de route dont la valeur finale serait égale.




Pourquoi un tel test? Le coût de production d'un cadre en aluminium est beaucoup moins élevé que le cadre en fibre, même si on prend soin d'en faire un bon. La seule chose qui pourrait le rendre dispendieux, serait de recourir à un fournisseur de tubes comme Columbus ou Dedacciai, alors que les fournisseurs de tubes génériques comme ceux qu'on trouve à Taiwan proposent de bons produits, variés, avec lesquels je n'ai jamais eu de problèmes. Certains de ces tubes sont raffinés et performants.Les fournisseurs italiens (ou les équivalents d'autres pays) n'ont d'ailleurs plus la cote comme ils l'ont eu durant les années '80 ou même '90.



Donc, si le cadre en aluminium coûte moins cher, un vélo de valeur égale bâti avec un tel cadre sera équipé de pièces et de roues de valeur supérieure. Donc plus légères. Si vous sauvez, par exemple, 400 grammes dans le cadre en utilisant la fibre de carbone, mais que les pièces sont plus lourdes parce que le cadre a bouffé une plus grande partie du budget disponible, il n'est pas interdit de penser que, à valeur égale (permettez-moi d'insister sur ce point), le vélo à cadre alu sera aussi léger. Qui sait, ô insulte, peut-être même plus léger? J'ai l'impression que c'est possible, si on fait bien ses devoirs.


Le début de la Route de Saint-Pierre, à quelques centaines de mètres du village.


Ce qui m'amène à toucher trois points:

  1. Si vous avez 4000$ ou plus à mettre sur une telle machine, la question ne se pose pas beaucoup. Vous avez accès à ce prix à un cadre en fibre équipé de pièces très correctes qui pourraient vous satisfaire à long terme à moins de fixer la barre vraiment très haut, pour des raisons que votre entourage ne comprendra peut-être pas. Comme le dit la chanson: Don't explain.
  2. Les sensations que vous aurez sur un cadre en fibre de carbone sont souvent supérieures à celles que vous aurez sur un cadre en alu, indépendamment de la question de la légèreté. Souvent, mais pas toujours. Les cadres en fibre les moins agréables sont assurément moins plaisants que les cadres en alu les mieux réussis. Essayez-en quelques-uns et on s'en reparlera, si ce n'est pas déjà fait. Et méfiez-vous d'un vendeur qui insinuerait, ou même dirait, que tous les cadres en alu sont raides, inconfortables, ou je ne sais trop quel cliché facile. Les cadres en alu ne sont pas tous pareils, comme d'ailleurs tous les autres matériaux. Il faut essayer pour se faire une idée, on n'en sort pas. Dans le cas qui nous occupe ici, les deux cadres en présence offraient des sensations que je n'hésiterais pas à proposer à un amateur exigeant. Tout au plus, si un client a un kilométrage annuel vraiment élevé, à ce moment je lui suggérerais un cadre en fibre de carbone bien choisi. Avec comme seule réserve le point no. 3 qui suit.
  3. Les cadres en fibre de carbone sont un peu plus sensibles aux incidents et accidents de toute nature qui font partie de la vie. Souvent, les vendeurs qui travaillent chez les détaillants de vélo vous diront qu'un tel cadre est bon pour la poubelle s'il a été abîmé. Ici, chez Bicycles Falardeau, nous avons réparé quelques cadres en fibre, cette année, et nous avons toujours réussi à faire ces réparations, sans jamais massacrer l'esthétique du produit. Grosse économie pour le propriétaire de la machine. Mais le technicien qui a travaillé sur ces cadres n'a pas tellement envie de s'en procurer un pour lui-même, d'autant plus qu'il a un gabarit imposant et des habitudes de conduite influencées par sa pratique du vélo de montagne.

Au village de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud

Un parcours agréable du début à la fin, mais si c'était à refaire, j'éliminerais le segment du début, entre Saint-François et Saint-Pierre, pour passer plus de temps sur la Route de Saint-Pierre, plus tranquille et plus rustique que ce premier segment. Car cette route continue jusqu'à Saint-Paul-de-Montminy. J'y retournerai.


Personnellement, je voterais pour Brian Blade s'il se présentait. En autant que ça ne l'empêche pas de continuer à taper sur ses tambours.

vendredi 4 novembre 2016

CONVERSATION.





Entre Lyster et Kinnear's Mills, 30 octobre 2016.



Conversation privilégiée à bâtons rompus avec un intervenant de l'industrie canadienne du vélo, cette semaine. Nous sommes facilement d'accord sur un tas de choses. Voici, pêle-mêle, quelques sujets abordés.


  • Comme dans d'autres industries, le marketing a un poids énorme dans les décisions. Ajoutez à cela une part de mauvaise ingénierie, vous pouvez vous douter que dans le monde du vélo, certains produits sont peu désirables, ne correspondent pas aux besoins des cyclistes, ou sont simplement mal conçus, perfectibles, quand ce n'est pas tout simplement défectueux ou irritants lors de la pose. Ne vous demandez pas pourquoi, lui comme moi, nous nous fabriquons nous-mêmes nos vélos.
  • L'apparition du vélo de gravelle (gravel bike) ressemble à une concoction de l'industrie pour vous faire acheter un autre vélo. Personnellement j'en vois qui ont des transmissions mal adaptées à mes parcours de gravelle, des freins lourds et compliqués, et un ensemble pas toujours bien léger. Ce dernier point est moins important sur le plat, mais au coeur des Appalaches, ça compte plus. La réalité, sur la gravelle, c'est qu'on peut rouler avec à peu près n'importe quelle sorte de vélo courant, à l'exception des pneus de 23 mm un peu trop étroits. Bien sûr, à force d'y aller, j'ai développé des préférences pour certains pneus, certaines transmissions, etc., mais justement, ces vélos qu'on nous propose expriment les préférences de quelqu'un d'autre, qui fait des parcours différents des miens.
  • Dans un autre ordre d'idée, il me dit que le dérailleur avant Shimano Deore est plus désirable que les modèles économiques à cause de la longueur des rivets et des matériaux utilisés. Et lui utilise avec bonheur un dérailleur avant prévu pour 9 vitesses sur une transmission qui n'en compte que 7. Personnellement je reste sceptique sur ce point, la largeur de la chaîne 7 ou 8 vitesses étant plus grande que celle de la chaîne pour 9 vitesses. Je m'attendrais à ce que la chaîne frotte à l'intérieur de la cage du dérailleur avant plus souvent lors des croisements de chaîne, ce qui diminue le nombre de combinaison plateau/pignon possibles.
  • Les leviers de vitesses route Dura Ace se démarquent par leur action très agréable. Pour le reste, Ultegra fait bien l'affaire. Bonne nouvelle (même si ce n'est pas une nouvelle): on peut combiner les deux sur un même vélo. Il fut un temps où ce n'était pas possible.
  • Les mécanismes des leviers de route SRAM ont une similitude frappante à travers toute la gamme de la marque. 
  • Chez Campagnolo, le problème n'est pas tant au niveau de l'utilisation, mais plutôt du côté de l'entretien, spécifiquement le travail en atelier qui n'est pas toujours des plus faciles.
  • 200 grammes d'allègement sur un vélo, c'est imperceptible. Il en faut plus, nous sommes d'accord là-dessus. 
  • Nous n'avons pas abordé le sujet de front, mais je constate que malgré sa grande familiarité avec les pièces de haut-de-gamme, il était très souriant malgré le calibre relativement modeste des composantes qui équipaient son vélo du jour. Le cadre qu'il utilisait en était un très bon, les roues également, mais certains éléments de transmission n'avaient rien de prestigieux. Et malgré cela, l'efficacité était là, et il aurait pu nous larguer n'importe quand. Ce n'est pas la première fois que je vois un professionnel du vélo (je ne parle pas d'un coureur professionnel, évidemment) utiliser des pièces de niveau Alivio ou inférieures, sans s'en plaindre le moindrement. 





Le 14 octobre dernier, je vous parlais de six petits tests que j'avais l'intention de faire pour mesurer la performance de deux vélos différents. Les six tests sont faits, mais je me suis pris au jeu et je continue pour améliorer la validité des chiffres et aussi pour ajouter d'autres vélos à ceux déjà prévus.

Déjà, des conclusions émergent qui font évoluer ma perspective sur les vélos de route et leur performance. Je vous en ferai part très bientôt ici même.





Sacré Roger, toujours le mot pour rire:





Un parcours très recommandable, dimanche dernier. Majoritairement en gravelle, avec un gain d'élévation autour de 700 mètres. Départ à Lyster, puis demi-tour près de Kinnear's Mills, dans les Appalaches.



On n'y voit pas souvent de cyclistes, dans ces secteurs. Dommage. Et à plus forte raison, avec une température moyenne de 3 degrés Celsius, nous avions l'exclusivité. Des passants motorisés qui nous ont vus nous ont encouragés d'un pouce en l'air. Mais n'y voyez pas d'exploit, c'était beaucoup trop agréable pour tomber dans cette catégorie-là. Ça nous a seulement donner le goût de continuer. Il n'y avait pas de neige sur la route, mais plus nous approchions de Kinnear's Mills, plus nous en avons vue ici et là. La photo ci-dessous vous montre ce village, surtout son clocher, vu de loin.



Et parlant de routes de gravelle, je provoque parfois de la surprise lorsque les gens voient les pneus que j'y utilise. Parce qu'ils sont parfaitement lisses. Pas de dessin de semelle agressif, même pas de petites lignes plus ou moins discrètes.

Je n'ai pas de souci de traction sur ces routes, et pas de manque de fiabilité dans la direction non plus. Mes pneus lisses sont plus légers et je n'ai pas de problème de crevaisons à moins de laisser un pneu trop usé en fonction.



Ne soyez pas surpris si vous ne connaissez pas la marque de pneus de vélo Terrene. Elle vient tout juste d'apparaître sur le marché.

Le gérant Tim Krueger parlait récemment à un journaliste de Bicycle Retailer and Industry News à propos de leurs pneus de gravelle Elwood: "One of the issues with gravel tires are treads that pick up and hold gravel where it eventually buries itself into the tire and causes a flat. We paid particular attention to design Elwood's tread to shed gravel, removing one problem area."

http://terrenetires.com/elwood/
There are places that beg to be seen, and roads that will not be ignored. 

Je roule avec des pneus complètement lisses depuis des années. Michelin, Avocet, Cadence, ils m'ont tous donné satisfaction. Leur seul défaut, pour le vendeur que je suis, c'est qu'il faut que je rassure les clients qui considèrent un tel achat avec perplexité. Non monsieur, non madame, il n'y a pas d'aquaplanage sur un vélo... Et ce n'est pas en creusant des lignes dans la semelle qu'on va augmenter l'adhérence. Ça ne fait qu'enlever du caoutchouc.



Je vous ai déjà parlé des vélos dont le cadre est en bois ou en bambou, ici. En voici qui aura roulé beaucoup:

https://www.theguardian.com/environment/2016/nov/03/environmental-activist-gears-up-for-6000-mile-bamboo-bike-ride





Certains reconnaîtront peut-être cette chanson que Richie Havens avait popularisée.